
L’École Polytechnique, joyau de l’enseignement supérieur français depuis 1794, acceuille depuis toujours des étudiants internationaux. Mais les chiffres du concours 2023 révèlent une réalité saisissante : sur 60 places ouvertes aux étudiants étrangers issus des classes préparatoires, 41 ont été décrochées par des candidats marocains. Cette performance exceptionnelle – représentant près de 70% des admissions internationales – marque une progression spectaculaire par rapport aux 16 lauréats marocains de l’année précédente.
Cette prééminence marocaine à l’X n’est pas un coup d’éclat isolé. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large où les étudiants du Royaume chérifien excellent systématiquement dans les concours les plus sélectifs de France. Avec plus de 46 000 étudiants marocains inscrits dans l’enseignement supérieur français en 2021-2022, le Maroc constitue le premier viviers de talents étrangers pour l’Hexagone.
Le secret de cette réussite ? Un système de classes préparatoires marocaines qui a su s’adapter et exceller selon les standards français. Le Lycée d’Excellence de Benguérir (Lydex), véritable pépinière de polytechniciens, illustre parfaitement cette stratégie gagnante. En 2020, 17 élèves de cet établissement ont intégré Polytechnique, suivis de 11 autres en 2021. Sur les 40-41 admis marocains de 2023, 25 proviennent directement des prépas marocaines, témoignant de la qualité de la formation dispensée sur place, mais aussi de l’attrait des grandes écoles françaises pour les étudiants marocains.
Un contraste saisissant avec les autres nationalités
La comparaison avec les autres pays accentue le caractère exceptionnel de cette performance. La Tunisie, deuxième nation représentée, ne compte que 10 admis – soit quatre fois moins que le Maroc. Les sept autres pays représentés (Algérie, Autriche, Canada, Chili, Chine, Congo, Roumanie et République tchèque) se partagent les neuf places restantes, avec souvent un unique représentant par nationalité.
Cette disproportion interroge : comment expliquer qu’un pays de 37 millions d’habitants surpasse largement des nations comme la Chine ou même l’ensemble du continent africain dans l’accès à l’une des plus prestigieuses écoles d’ingénieurs au monde ?
Les facteurs d’une réussite systémique
Plusieurs éléments convergent pour expliquer cette excellence marocaine :
D’abord l’investissement stratégique dans l’éducation. En effet, le Maroc a fait de la formation d’une élite scientifique une priorité nationale, créant des établissements d’excellence calqués sur le modèle français mais adaptés aux réalités locales.
Ensuite la maîtrise parfaite du système français et de la langue. Les classes préparatoires marocaines ont intégré les codes, les méthodes et les exigences spécifiques des concours français. Par aiulleurs, contrairement à d’autres candidats internationaux, les Marocains maîtrisent parfaitement le français académique, éliminant une barrière majeure.
Enfin, une culture de l’excellence mathématique commune au pays du Maghreb. Les lycées marocains cultivent une tradition forte en mathématiques et sciences exactes, disciplines reines des concours d’entrée aux grandes écoles.
Cette domination marocaine, aussi impressionnante soit-elle, soulève des questions sur la diversité réelle du recrutement international de Polytechnique. Avec 140 places internationales prévues pour 2024 (45 en CPGE, 95 en filières universitaires), l’école cherche visiblement à élargir son vivier. Mais pour l’École Polytechnique, qui met en avant la richesse de son environnement multiculturel avec des étudiants « issus de plus de 100 pays différents », cette situation présente un paradoxe : comment concilier excellence méritocratique et diversité géographique ?




