Khartoum sous les drones : la guerre reprend au cœur du Soudan


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Soldats de l'armée soudanaise
Soldats de l'armée soudanaise

De violentes frappes de drones ont de nouveau frappé Khartoum et Omdurman, ravivant le chaos au cœur du Soudan. L’armée accuse les Forces de soutien rapide d’être à l’origine de ces attaques, qui menacent le fragile retour à la stabilité dans la capitale. Deux ans après le début du conflit, la guerre entre généraux semble plus éloignée que jamais d’une issue.

La guerre qui ravage le Soudan depuis plus de deux ans vient de frapper à nouveau la capitale. Dans la nuit de mardi à mercredi, Khartoum et sa ville jumelle Omdurman ont été la cible d’intenses frappes de drones, faisant résonner de fortes explosions au-dessus d’une cité meurtrie. Alors que l’armée affirme avoir abattu la plupart des engins, ces attaques rappellent que la stabilité retrouvée de la capitale reste fragile, dans un pays plongé dans l’une des pires crises humanitaires du monde.

Des frappes inédites sur une capitale meurtrie

Selon une source militaire soudanaise, plusieurs drones ont visé deux bases de l’armée situées dans le nord-ouest de Khartoum. L’armée assure en avoir « abattu la plupart », tandis que des témoins à Omdurman décrivent des « explosions puissantes » entendues durant plusieurs heures dans la nuit. Ces frappes, attribuées aux Forces de soutien rapide (FSR), marquent un regain de tension dans une capitale que l’armée avait pourtant réussi à stabiliser depuis le printemps.

Depuis le 15 avril 2023, le Soudan est déchiré par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés : le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée et dirigeant de facto du pays, et le général Mohamed Hamdane Daglo, dit « Hemedti », à la tête des puissantes FSR. Ce conflit a déjà coûté la vie à des dizaines de milliers de personnes et déplacé des millions d’autres. L’ONU qualifie aujourd’hui la situation soudanaise de « plus grande crise humanitaire actuelle ».

Un fragile retour à Khartoum

Après des mois de combats acharnés, plus de 800 000 habitants sont revenus s’installer dans la capitale, partiellement reprise par l’armée. Le gouvernement, provisoirement basé à Port-Soudan, a même lancé un ambitieux programme de reconstruction. Mais de larges pans de Khartoum demeurent détruits, sans eau, sans électricité ni services de base. Les récentes frappes viennent compromettre ces efforts de reconstruction et ravivent la peur d’un nouveau cycle de violences.

Si la capitale connaît un retour des frappes, les affrontements les plus sanglants se déroulent toujours à l’ouest, dans la région du Darfour. Les FSR y assiègent la ville stratégique d’el-Facher depuis 18 mois. Plus de 400 000 civils y sont pris au piège, confrontés à la famine, aux bombardements d’hôpitaux et à la destruction des infrastructures vitales. L’ONU a mis en garde contre un risque de massacres à caractère ethnique dans cette région déjà meurtrie par des décennies de guerre.

Malgré les efforts de médiation internationale, aucun accord de cessez-le-feu durable n’a vu le jour. Tandis que l’armée tente de maintenir son contrôle sur le centre et le nord du pays, les FSR et leurs alliés consolidant leurs positions dans le Darfour et le sud. Pour de nombreux Soudanais, les frappes de drones sur Khartoum rappellent que la paix reste un mirage et que la reconstruction d’un pays à genoux ne pourra commencer qu’une fois les armes tues.

Maceo Ouitona
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Maceo Ouitona est journaliste et chargé de communication, passionné des enjeux politiques, économiques et culturels en Afrique. Il propose sur Afrik des analyses pointues et des articles approfondis mêlant rigueur journalistique et expertise digitale
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