
Les funérailles nationales de Raila Odinga, figure mythique de l’opposition kényane, ont viré au drame à Nairobi. Deux morts et plus de 160 blessés ont été recensés lors d’une bousculade dans le stade Nyayo, où des milliers de Kényans s’étaient rassemblés pour lui dire adieu. Une tragédie à l’image du parcours tumultueux de celui que le peuple appelait “Baba”.
Les funérailles nationales de Raila Odinga, figure emblématique de l’opposition kényane, ont tourné au drame. Deux personnes ont perdu la vie et plusieurs dizaines ont été blessées lors d’une bousculade dans le stade Nyayo de Nairobi, où des dizaines de milliers de citoyens étaient venus faire leurs adieux à celui qu’ils appelaient affectueusement Baba.
Une cérémonie d’hommage transformée en tragédie
Le Kenya s’était arrêté ce vendredi 17 octobre 2025 pour saluer une dernière fois la mémoire de Raila Odinga, mort à 80 ans en Inde, d’un arrêt cardiaque. Dans le stade Nyayo, près de 40 000 personnes s’étaient rassemblées pour cette grande prière nationale. L’ambiance, d’abord recueillie, a basculé dans la confusion lorsque la foule, submergée par l’émotion, a tenté de s’approcher du cercueil.
Les forces de sécurité ont rapidement été débordées. Des témoins rapportent que certaines tribunes se sont soulevées dans un mouvement collectif, forçant des spectateurs à sauter pour éviter d’être écrasés. Près du cercueil, des fidèles se sont fait piétiner alors que les militaires ordonnaient de reculer. Médecins sans frontières a indiqué avoir pris en charge 163 blessés, dont plusieurs souffrant de fractures et de difficultés respiratoires. Deux décès ont été confirmés.
Le peuple en deuil pour son “Baba”
Pour les Kényans, la mort de Raila Odinga représente bien plus que la disparition d’un homme politique. C’est la perte d’un symbole de résistance et de justice sociale. « Baba n’est plus ! Baba, donne-nous la voie à suivre », sanglotait Rosa Roco, venue d’Oma Bay, sur les rives du lac Victoria. Des milliers d’autres ont bravé la fatigue, parfois voyageant toute la nuit, pour lui rendre hommage. Sa fille, Winnie Odinga, a livré un témoignage bouleversant : « Il est mort fort, digne et fier. L’esprit du lion s’est élevé pour toujours. »
La cérémonie, retransmise dans tout le pays, s’est vite transformée en tribune politique. L’évêque anglican David Kodia a salué « un homme qui n’a jamais acheté le pouvoir, mais qui a conquis les cœurs par ses mots ». Le président William Ruto, longtemps rival d’Odinga, a lui aussi rendu hommage à « un patriote, un réformateur acharné et un serviteur fidèle du peuple kényan ».
Mais derrière ces hommages officiels, la tension restait palpable. La veille, lors de la veillée funèbre au stade Kasarani, la police avait ouvert le feu sur la foule, tuant trois personnes selon l’ONG Vocal Africa. Ces violences ont renforcé l’émotion et la colère d’une population déjà meurtrie.
Une fin tragique à l’image d’un parcours tumultueux
Raila Odinga laisse derrière lui l’héritage d’un homme qui aura marqué plus d’un demi-siècle de vie politique au Kenya. Opposant historique, emprisonné, persécuté mais jamais réduit au silence, il incarnait l’espoir d’une démocratie plus juste. Sa mort provoque un vide immense, mais aussi un questionnement sur l’avenir politique du pays et la capacité de ses dirigeants à maintenir la cohésion nationale.
Alors que les Kényans pleurent leur “Baba”, la douleur collective se mêle à une amère constatation : même dans la mort, celui qui a tant combattu pour la liberté du peuple n’a pas échappé à la violence.