
Un ancien ministre de la justice sous Macky Sall a été placé sous surveillance électronique pour des faits présumés de corruption dans l’attribution d’un marché public. L’affaire fait grand débat dan ce pays d’Afrique de l’Ouest.
Ismaila Madior Fall, ancien ministre sénégalais de la Justice, a été placé sous bracelet électronique et assigné à résidence par la Commission d’instruction de la Haute Cour de Justice (HCJ), à l’issue de son audition. Cette décision fait suite à des accusations de corruption et de détournement de fonds publics liées à l’attribution d’un marché pour la réalisation d’un Centre de surveillance électronique. M. Fall, qui a dirigé le ministère sénégalais de la Justice entre 2017-2019 puis de 2022 à 2023, est l’un des cinq anciens ministres de l’ère Macky Sall visés par une mise en accusation adoptée le 8 mai par l’Assemblée nationale.
Mis en cause dans un rapport de la Cour des comptes de 2022
L’accusation principale repose sur le témoignage d’un promoteur immobilier chargé du projet, qui affirme avoir remis 50 millions de francs CFA à Ismaila Madior Fall, sur un total exigé de 250 millions, en échange du marché. Ce promoteur ainsi que l’ancien directeur des constructions publiques du ministère de la Justice ont été placés en garde à vue. Ismaila Madior Fall a reconnu avoir reçu la somme, mais affirme l’avoir rendue et évoque une « dation en paiement » pour le projet.
La comparution de Madior Fall intervient après celle de Ndèye Saly Diop, ex-ministre de la Femme, qui a été placée sous contrôle judiciaire après paiement d’une caution. Les trois autres anciens ministres concernés – Moustapha Diop, Aissatou Sophie Gladima et Mansour Faye- doivent encore comparaître. Ils sont notamment mis en cause dans un rapport de la Cour des comptes de 2022 sur la gestion des fonds liés à la pandémie de Covid-19.
Réactions suite à la décision à l’encontre de Madior Fall
La HCJ est rarement sollicitée au Sénégal. Les précédents notables datent de 1963, avec la condamnation de Mamadou Dia, et de 2005, avec le non-lieu d’Idrissa Seck. La décision concernant Ismaila Madior Fall a suscité des réactions. Le militant des droits de l’Homme Alioune Tine a salué son intégrité. « J’ai travaillé avec le professeur Ismaila Madior, j’ai beaucoup apprécié le juriste constitutionnaliste, j’ai partagé des combats pour la promotion de la démocratie, de l’État de droit, des droits humains et des libertés à la Raddho », a-t-il écrit sur X.
Pour sa part, Pape Malick Ndour, ancien ministre de la Jeunesse, a dénoncé un acharnement politique et une humiliation symbolique. « Ce matin, jusque devant le bureau du président de la Cour d’appel, accompagnant mon ancien collègue, j’ai vu un Ismaila Madior Fall digne, calme, inébranlable, qui marche la tête haute dans la tempête ». Reste à savoir si l’ancien ministre Justice sénégalaise est symboliquement humilié ou légalement il est inquiété.