Historique et enjeux des richesses des sous-sols africains


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Des mines
Des mines

Alors que l’administration Trump adopte une nouvelle approche économique envers l’Afrique et que des tensions persistent dans plusieurs pays du continent, les ressources minières africaines cristallisent des enjeux géopolitiques majeurs. Entre exploitation historique, course aux minerais stratégiques et volonté d’émancipation économique, l’Afrique cherche à reprendre le contrôle de ses richesses souterraines qui alimentent paradoxalement des conflits dont elle est la première victime.

Un sous-sol aux richesses exceptionnelles

Le sous-sol africain recèle une diversité remarquable de ressources minières. On y trouve d’abord les ressources énergétiques et industrielles comme les phosphates, le pétrole, le charbon et l’uranium. S’y ajoutent les minerais ferreux et non ferreux tels que le manganèse, la bauxite et le chrome, ainsi que les métaux de base comme le cuivre, le nickel et le cobalt. Le continent abrite également des matières précieuses, or, platine et diamants, et des minerais essentiels à la transition énergétique comme le lithium et le graphite.

Ces ressources revêtent un caractère stratégique pour plusieurs raisons : elles sont essentielles à la sécurité nationale de nombreux pays, indispensables aux technologies vertes et à la transition vers une économie décarbonée. Leur disponibilité limitée et leur approvisionnement, soumis à des risques logistiques et politiques importants, en font des matériaux irremplaçables.

Une exploitation millénaire bouleversée par la colonisation

L’exploitation minière en Afrique possède des racines anciennes. Dans le bassin du Congo, le cuivre, appelé « croisette », servait déjà de monnaie d’échange au VIIIe siècle. Cependant, l’histoire minière moderne du continent reste indissociable de la colonisation et du développement industriel européen du XIXe siècle.

Si la décolonisation a entraîné une vague de nationalisations minières, le début des années 1990 marque un tournant avec l’ouverture progressive aux entreprises étrangères. Cette libéralisation provoque une explosion de l’extraction minière au début du XXIe siècle, accompagnée d’une hausse significative des prix sur les marchés internationaux. Paradoxalement, bien que l’Afrique devienne une puissance énergétique incontournable, les revenus générés ne profitent que marginalement aux populations locales.

Les minerais africains sont devenus indispensables à l’économie mondiale. Ils entrent dans la composition de nombreux produits du quotidien : téléphones portables, appareils numériques, véhicules électriques. Le continent héberge plus de soixante types de minerais différents, représentant un tiers des réserves mondiales.

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Plusieurs pays occupent des positions dominantes sur des minerais stratégiques. L’Afrique du Sud domine la production mondiale de manganèse, de chrome et de platine, tout en étant le troisième producteur de titane. La République démocratique du Congo (RDC) règne sur le marché du cobalt et fournit plus de 10% de la production mondiale de cuivre. La Guinée possède les plus grandes réserves mondiales de bauxite. Le Ghana, la Namibie, le Zimbabwe et le Mali détiennent d’importantes réserves de lithium. Le Mozambique et Madagascar excellent dans la production de graphite, tandis que le Rwanda et la RDC dominent l’exportation de coltan. Les tensions actuelles dans l’est de la RDC pourraient d’ailleurs être liées au pillage de ces ressources stratégiques.

Une ruée minière aux acteurs multiples

L’accélération de la transition énergétique et numérique a provoqué une croissance exponentielle de la demande en minerais stratégiques. Ces ressources sont essentielles pour les infrastructures vertes (panneaux solaires, éoliennes), le stockage de données et les écrans tactiles.

Les principaux exploitants demeurent les multinationales européennes, nord-américaines et asiatiques comme Glencore, Rio Tinto ou China Molybdenum. Parallèlement, une part significative de l’extraction reste assurée par des mineurs artisanaux travaillant dans l’informalité et des conditions souvent précaires.

Face à cette situation aux ramifications complexes, plusieurs pays africains, Cameroun, RDC, Afrique du Sud,adaptent leurs codes miniers et intensifient les travaux d’exploration. Ils limitent progressivement les exportations de matières premières brutes par les compagnies étrangères, favorisant l’émergence d’industries locales de transformation.

Le défi principal reste d’attirer les investissements nécessaires à la construction d’usines sur le continent et au développement de l’emploi local. Le constat demeure alarmant : le secteur minier ne génère que 2 millions d’emplois directs en Afrique, un chiffre dérisoire au regard de l’ampleur des ressources exploitées. La transformation sur place des minerais extraits représente ainsi un enjeu crucial pour que le continent bénéficie enfin pleinement de ses richesses souterraines.

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Franck Biyidi est diplômé de l'IRIC (Institut des Relations Internationales du Cameroun) je suis spécialiste des relations internationales au sein de la Francophonie et de l'Union Africaine et de tout ce qui touche la diplomatie en Afrique francophone
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