
À l’approche de chaque nouvelle campagne oléicole, une même inquiétude ressurgit : celle de la qualité de l’huile d’olive produite et commercialisée au Maroc. Produit emblématique du terroir national et pilier de l’économie agricole, l’huile d’olive marocaine souffre encore de pratiques douteuses qui menacent sa réputation, aussi bien sur le marché local qu’à l’international. Face à cette situation, des voix s’élèvent pour réclamer une gouvernance plus rigoureuse du secteur, à commencer par un encadrement strict des huileries.
Alors que débute la nouvelle saison oléicole, les inquiétudes grandissent autour de la qualité de l’huile d’olive marocaine. Entre fraudes à la composition, absence de traçabilité et risques environnementaux liés aux déchets des huileries, les défis s’accumulent pour un secteur pourtant essentiel à l’économie nationale. Des associations de défense du consommateur appellent aujourd’hui à une surveillance renforcée et à une gouvernance plus transparente afin de protéger la santé des citoyens et de sauvegarder la réputation de l’or vert marocain.
Un secteur vital en quête de transparence
Pour Ahmed Bayoud, président fondateur de l’association Avec les consommateurs, la situation est préoccupante. Selon lui, la multiplication des fraudes et des manquements dans certaines huileries nuit à la confiance du citoyen et met en péril la crédibilité de tout un secteur. Il plaide pour une politique claire de contrôle et de suivi, permettant de garantir la traçabilité complète du produit, de l’olivier jusqu’à la mise en bouteille.
L’idée principale qu’il défend repose sur la création d’une base de données nationale recensant l’ensemble des huileries traditionnelles et modernes. Cet outil permettrait aux autorités de suivre les opérations de production, de vérifier la provenance des olives, mais aussi d’assurer que les procédés d’extraction et de stockage respectent les normes sanitaires. Pour Bayoud, cette transparence serait une première étape décisive vers la réduction des fraudes et la protection du consommateur.
La traçabilité, clé d’une production saine et crédible
Le président de l’association souligne que la traçabilité doit devenir une exigence incontournable. Les cas de mélange entre huile d’olive et huiles de qualité inférieure ne sont pas rares, surtout en période de forte demande. De telles pratiques, en plus de tromper le consommateur, dévalorisent l’image du produit marocain. Une huile mal identifiée ou altérée ne représente pas seulement un risque économique, mais aussi un danger pour la santé, avertit Bayoud.
Il ajoute qu’un contrôle efficace doit également inclure la gestion des sous-produits du pressage, souvent négligée. Les déchets issus de la fabrication de l’huile peuvent, s’ils ne sont pas correctement traités, contaminer les sols et les nappes phréatiques. Pire encore, certaines pratiques illicites consistent à réutiliser ces résidus pour fabriquer des huiles frelatées, impropres à la consommation. Une supervision environnementale stricte s’impose donc pour éviter de telles dérives.
Une responsabilité partagée entre autorités et citoyens
Le vice-président de la Fédération marocaine pour la protection du consommateur rejoint cette analyse et alerte sur un phénomène inquiétant : le mélange de l’huile d’olive avec l’huile de table, une pratique frauduleuse de plus en plus répandue. Ce type de falsification met en danger la santé publique et mine la confiance des consommateurs envers les produits nationaux.
Cependant, il rappelle que la responsabilité ne repose pas uniquement sur les institutions publiques. Le consommateur a aussi un rôle à jouer. Acheter de l’huile d’olive dans des lieux non réglementés, sur les routes, devant les mosquées ou dans des points de vente informels, favorise la prolifération de ces pratiques. La vigilance du consommateur est donc considérée comme la première ligne de défense contre la fraude.
Des contrôles renforcés dès la récolte
Avant même le lancement de la saison de récolte, les experts appellent à intensifier les inspections sur le terrain. Les huileries doivent être suivies de près, notamment en ce qui concerne la propreté du matériel, le stockage des olives et la qualité du broyage. La moindre négligence à ces étapes peut altérer irrémédiablement le goût, la pureté et les propriétés nutritives de l’huile.
Ahmed Bayoud insiste sur l’importance d’une coopération interinstitutionnelle. Les autorités locales, les associations professionnelles, les fédérations de consommateurs et les services du ministère de l’Agriculture doivent unir leurs efforts pour instaurer une culture du contrôle et de la transparence. Il suggère également d’élargir le champ d’action de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) afin qu’il supervise aussi les petites et moyennes huileries, souvent laissées en marge des vérifications officielles.




