
N’en déplaise à Bruno Retailleau, c’est la première convocation historique pour le prodige d’origine algérienne qui rejoint Mbappé et Cherki chez les champions du monde. Une consécration qui illustre les liens indéfectibles entre la France et l’Algérie, malgré les tensions politiques.
Ce mercredi 27 août 2025 restera gravé dans la mémoire du jeune prodige de l’AS Monaco, mais aussi dans celle du football franco-maghrébin. Didier Deschamps a dévoilé ce mercredi sa liste de joueurs convoqués pour les matchs contre l’Ukraine et l’Islande, comptant pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2026. Maghnes Akliouche fait partie de la sélection de l’équipe de France pour la première fois, rejoignant un groupe où les liens avec l’Algérie n’ont jamais été aussi forts.
Aux côtés de Kylian Mbappé et de Rayan Cherki, tous deux aux origines algériennes par leurs mères, Akliouche incarne cette nouvelle génération franco-maghrébine qui redonne ses couleurs à l’équipe de France. Un symbole fort à l’heure où certaines voix politiques, à l’image de Bruno Retailleau, tentent d’opposer la France à l’Algérie.
Des racines kabyles aux Bleus
Maghnes Akliouche, né le 25 février 2002 à Tremblay-en-France, en Seine-Saint-Denis, évolue au poste de milieu à l’AS Monaco où il porte le numéro 11. Ses origines le relient intimement au Maghreb : Il possède également la nationalité algérienne du fait de ses parents originaires de Raffour, dans le wilaya de Bouira en Kabylie.
Cette double appartenance culturelle a longtemps alimenté les spéculations sur son choix de sélection. Pendant des mois, les observateurs se sont interrogés : choisirait-il la France, son pays de naissance, ou l’Algérie, terre de ses ancêtres ? La réponse est désormais claire, même si le chemin fut parsemé d’embûches.
Un talent qui a émergé au JO
Après avoir brillé aux Jeux Olympiques de Paris 2024 avec l’équipe de France espoirs, où il a disputé plusieurs matchs cruciaux, le Monégasque a continué d’impressionner au plus haut niveau européen. Lors de la première journée de Ligue des Champions 2024-2025, il marque son premier but européen contre le FC Barcelone participant à la victoire surprise 2-1 contre les Blaugrana.
La route vers les Bleus n’a pas été un long fleuve tranquille pour Akliouche. Malgré des performances remarquées en Ligue 1 et en Ligue des Champions avec Monaco, il a dû faire face aux réticences de Didier Deschamps. « Millot et Akliouche sont-ils loin? Oui et non c’est lié à la concurrence. Ils sont en Espoirs où l’équipe est relativement jeune. Mais il faut maintenir ce qu’ils font dans la durée« , avait déclaré le sélectionneur français en octobre 2024, évoquant aussi le cas d’Enzo Millot, autre binational franco-algérien du VfB Stuttgart.
L’Algérie, une déception qui rappelle l’affaire Zidane
Cette convocation sonne par contre le glas pour les espoirs algériens. Les supporters des Fennecs, qui caressaient l’espoir de voir ce joyau rejoindre leurs rangs, vivent une nouvelle désillusion. Cette situation rappelle l’éternel regret concernant Zinedine Zidane. Mais contrairement à Zizou, qui n’avait jamais été vraiment courtisé par l’Algérie dans les années 1990, Akliouche était bel et bien dans le viseur des dirigeants algériens. Ce qui rend la pilule encore plus amère à avaler. « Et si Zidane avait pu choisir l’Algérie ? » reste une question hypothétique qui hante les esprits à Alger, mais avec Akliouche, c’est une possibilité réelle qui vient de s’envoler.
La déception est d’autant plus grande qu’Akliouche, contrairement à d’autres binationaux, a toujours entretenu des liens forts avec ses origines. Ses parents de Raffour n’ont jamais renié leurs racines algériennes, et beaucoup espéraient que le cœur l’emporterait sur la raison sportive.
Mais le temps des hésitations est révolu. En choisissant les Bleus, Akliouche suit une logique pragmatique, privilégiant les chances de succès internationaux et la vitrine mondiale qu’offre l’équipe de France. Un choix compréhensible, qui fait que les supporters algériens continueront à supporter la France, comme du temps de Zidane, sauf lorsqu’elle jouera contre l’Algérie.
Le retour du « Black-Blanc-Beur »
Cette convocation s’inscrit dans un mouvement plus large : le retour des joueurs d’origine maghrébine en équipe de France. Après quelques années de relative discrétion, les voici de nouveau représentés en nombre avec Akliouche, Cherki, et dans une moindre mesure Mbappé qui n’a jamais renié ses origines algériennes.
Un détail révélateur : tous les joueurs d’origine maghrébine de cette sélection ont des liens avec l’Algérie. Pas de Marocains ou de Tunisiens, mais une représentation exclusivement algérienne qui témoigne des liens particuliers entre les deux rives de la Méditerranée et de l’importance de la communauté algérienne en France, première communauté étrangère de l’Hexagone. Cette présence massive contredit les discours de division et prouve que la France et l’Algérie sont indissociables, jusque dans leurs élites sportives.
Pour la jeunesse des quartiers, voir Akliouche côtoyer Mbappé au plus haut niveau mondial envoie un signal puissant : leurs origines ne sont pas un frein, mais une richesse. Cette équipe de France « Black-Blanc-Beur » nouvelle génération renoue avec l’héritage de 1998, prouvant que la diversité reste l’une des forces du football français.
Un symbole de fierté malgré la déception
Au-delà de l’amertume légitime côté algérien, la convocation d’Akliouche suscite aussi une fierté immense dans la diaspora. Voir un fils d’Algérie évoluer aux côtés des plus grands joueurs du monde, dans l’une des meilleures équipes de la planète, reste un motif d’orgueil considérable.
Cette sélection démontre que les enfants de l’immigration maghrébine continuent d’exceller au plus haut niveau international. Son parcours, de Villemomble aux pelouses de l’élite européenne, inspire une jeunesse qui se reconnaît en lui et qui comprend que tous les rêves restent permis.
La présence simultanée d’Akliouche, Cherki et Mbappé dans le même groupe illustre paradoxalement la réussite de l’intégration à la française. Ces champions du monde en devenir portent fièrement leurs origines tout en servant les couleurs tricolores, démontrant que l’identité plurielle n’est pas un obstacle mais un atout. Même si l’Algérie perd un talent, elle peut s’enorgueillir de voir ses enfants briller sur la scène mondiale. Car au-delà des maillots, ces joueurs restent des ambassadeurs de leurs racines et de leur culture.
Les défis à venir
Cette première convocation n’est qu’un début. Akliouche devra désormais confirmer sa place dans un groupe où la concurrence est féroce. Les matchs contre l’Ukraine le 5 septembre à Wrocław et contre l’Islande le 9 septembre au Parc des Princes seront ses premiers tests en équipe de France A.
À 23 ans, le natif de Tremblay-en-France a encore de belles années devant lui pour s’imposer durablement chez les Bleus. Son histoire ne fait que commencer, mais elle illustre déjà parfaitement la richesse des footballs français et algérien.