
La grande dame du théâtre et du cinéma algérien s’est éteinte ce mardi 25 novembre 2025 à l’hôpital Béni Messous d’Alger, des suites d’un cancer du poumon. Figure emblématique de la culture populaire algéroise, Baya Bouzar, connue sous le nom de Biyouna, laisse derrière elle un héritage artistique exceptionnel qui a marqué plusieurs générations. Le président Tebboune et la ministre de la Culture ont salué la mémoire de cette artiste au parcours unique, restée en Algérie durant la décennie noire et devenue une icône internationale du cinéma francophone.
Une voix singulière s’est éteinte ce mardi matin à Alger
L’Algérie pleure l’une de ses plus grandes artistes. Baya Bouzar, de son nom de scène Biyouna, est décédée ce mardi 25 novembre 2025 à l’hôpital de Béni Messous à Alger, emportée par un cancer du poumon qu’elle combattait depuis 2016. À 73 ans, celle qui incarnait l’âme populaire algéroise laisse derrière elle un héritage artistique inestimable et un vide immense dans le paysage culturel algérien.
Hospitalisée depuis le 4 novembre, d’abord à Baïnem puis transférée au service de pneumologie de Béni Messous, l’artiste luttait contre des complications respiratoires sévères qui ont finalement eu raison de sa légendaire énergie.
Le président Tebboune salue « une célébrités de la scène culturelle »
La disparition de Biyouna a immédiatement suscité une vague d’émotion dans tout le pays. Le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, l’a exprimé dans son message de condoléances : « C’est avec émotion et tristesse que j’ai appris la nouvelle du décès de la regrettée artiste Biyouna, partie rejoindre Dieu Tout-Puissant« . Le chef de l’État a rendu hommage à celle qui « a contribué par son talent et sa créativité à de nombreuses œuvres télévisuelles et cinématographiques durant de longues années » , soulignant que « la défunte laisse, par sa sincérité et sa spontanéité, une large reconnaissance dans le domaine du jeu d’acteur et du cinéma« .
La ministre de la Culture et des Arts Malika Bendouda a également présenté ses condoléances, rappelant sa récente visite à l’artiste hospitalisée. « Bayouna n’était pas seulement une artiste, elle était une mère pour le théâtre et la culture algérienne« , a-t-elle déclaré, évoquant « son regard toujours empreint de passion et de créativité, et l’énergie qu’elle continuait à transmettre, malgré la maladie » .
La ministre a souligné que « chaque rôle incarné, chaque chanson interprétée, chaque éclat de rire offert sur scène témoignent de la richesse culturelle qu’elle laisse derrière elle » , affirmant que « son nom restera gravé dans la mémoire collective, inspirant les générations à venir« .
Un parcours artistique exceptionnel
Née le 13 septembre 1952 dans le quartier populaire de Belouizdad (ex-Belcourt) à Alger, Baya Bouzar avait conquis le public algérien dès 1973, à seulement 19 ans, grâce à son rôle dans le feuilleton télévisé culte « Al-Hariq » (« L’incendie« ). Cette première apparition marquante avait révélé une actrice au tempérament unique, capable de naviguer avec aisance entre le drame et la comédie.
Durant la décennie noire des années 1990, alors que de nombreux artistes fuyaient les violences qui déchiraient l’Algérie, Biyouna avait fait le choix courageux de rester dans son pays. Ce n’est qu’en 1999, à la fin des violences, que Biyouna franchit les frontières algériennes pour retrouver le réalisateur franco-algérien Nadir Moknèche, qui lui offrira certains de ses rôles les plus mémorables comme dans Viva Laldjérie.
Au-delà de l’Algérie, Biyouna s’était forgé une place de choix dans le cinéma français. Elle avait notamment marqué les esprits dans « La Source des femmes » de Radu Mihaileanu (2011), sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes, où elle incarnait une femme « gréviste de l’amour« . Plus récemment, elle était apparue dans « Les Trois Frères : Le Retour » (2014), « Neuilly sa mère, sa mère ! » et « Le Flic de Belleville » avec Omar Sy (tous deux en 2018).
Sa voix grave et rocailleuse, immédiatement reconnaissable, était devenue sa signature. Entre 2002 et 2005, elle avait conquis une nouvelle génération avec la trilogie télévisée « Nass Mlah City« , où ses personnages hauts en couleur mêlaient dérision et finesse d’interprétation.
Une artiste complète
Biyouna était également chanteuse et humoriste. En effet, elle avait enregistré un album, « Raid Zone », sorti en 2001, et s’était illustrée dans le one-woman-show dans les cabarets d’Alger. Cette polyvalence artistique lui permettait de toucher tous les publics, des plus populaires aux plus exigeants. En outre, elle avait défrayé la chronique avec des scènes osées dans « À mon âge je me cache encore pour fumer » (2017), démontrant jusqu’au bout son courage artistique et son refus des conventions.
La défunte rejoindra sa dernière demeure ce mercredi 26 novembre après la prière d’El Dohr, au cimetière d’El Alia, Bab-Azzouar à Alger. Des milliers d’Algériens sont attendus pour rendre un dernier hommage à celle qui incarnait l’âme populaire d’Alger, son humour piquant et cette façon unique de raconter des histoires.



