Darfour : neuf soignants libérés, 73 toujours détenus par les FSR


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Silence médiatique en Afrique
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Alors que les attaques contre les structures médicales ont fait près de 1 900 morts au Soudan depuis avril 2023, les Forces de soutien rapide ont libéré neuf soignants détenus à Nyala. Soixante-treize autres restent aux mains des paramilitaires dans des conditions alarmantes.

Au Soudan, les Forces de soutien rapide (FSR) ont libéré neuf agents de santé détenus à Nyala, capitale de l’État du Darfour du Sud. Une libération qualifiée de « positive » par le Réseau des médecins du Soudan. Cependant, cela laisse encore 73 personnels médicaux aux mains des paramilitaires dans des conditions jugées « extrêmement précaires ».

Cette libération intervient dans un contexte de violence systématique contre le secteur de la santé soudanais. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a indiqué vendredi que les attaques contre les établissements de santé au Soudan ont fait 1 858 morts et 490 blessés depuis le début du conflit à la mi-avril 2023.

Plus de 230 soignants tués depuis le début de la guerre

Le Réseau des médecins du Soudan a dressé jeudi un tableau désespérant : 234 personnels médicaux ont été tués, 507 blessés et 59 portés disparus depuis le début de la guerre. L’organisation tient la direction des FSR « pleinement responsable de la sécurité et de la vie des civils détenus », exigeant leur libération immédiate.

Selon les estimations du Réseau, plus de 19 000 personnes seraient actuellement détenues par les FSR à l’échelle nationale. Ainsi, les familles des détenus vivent dans l’angoisse. L’organisation a exhorté les agences des Nations unies à obtenir un accès immédiat aux détenus, affirmant que les familles sont laissées sans nouvelles de leurs proches en raison du « secret imposé autour des conditions de détention à Nyala » rapporte Anadolu Ajansı.

Écoles et hôpitaux bombardés : 114 morts dont 63 enfants

Le 4 décembre dernier, une attaque contre une école maternelle au Soudan s’est poursuivie alors que les parents et les soignants transportaient les blessés vers un hôpital voisin. Selon l’OMS, elle a fait 114 morts, dont 63 enfants. Le directeur général de l’organisation, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a dénoncé ces « attaques insensées » où même les secouristes ont été pris pour cible.

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L’OMS recense désormais 63 attaques contre des établissements de santé depuis le début de l’année au Soudan, ayant causé 1 611 morts et 259 blessés. Fin octobre, la prise d’El Fasher par les FSR a marqué un nouveau cap dans l’horreur. L’OMS s’est dite « consternée et profondément choquée » après des informations sur le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité de cette ville du Darfour.

Selon l’OMS, plus de 70 % des établissements de santé dans les zones touchées par le conflit sont soit à peine opérationnels, soit complètement fermés, laissant des millions de personnes sans accès aux soins essentiels.

On estime à 10 millions le nombre de personnes déplacées au Soudan, dont la moitié sont des enfants. Plus de 30 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence. La famine aggrave encore la catastrophe. Environ 21,2 millions de personnes, soit 45 % de la population, sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë explique l’UNICEF. Les conditions de famine sont confirmées dans les villes assiégées d’El Fasher et de Kadugli.

L’Union européenne sanctionne un commandant des FSR

Les organisations humanitaires multiplient les appels. L’Union européenne a adopté des mesures restrictives contre Abdelrahim Hamdan Dagalo, commandant en second des FSR, et se dit « prête à imposer de nouvelles mesures restrictives à tous les acteurs responsables d’activités déstabilisant le Soudan ».

Le Réseau des médecins du Soudan appelle la communauté internationale et les organisations humanitaires à prendre des mesures immédiates pour protéger les personnels de santé, qualifiant ces actes de « violation manifeste des lois internationales qui assurent la protection du personnel médical en période de conflit armé ».

Depuis avril 2023, la guerre civile oppose les Forces armées soudanaises du général Abdel Fattah al-Burhan aux paramilitaires des FSR de Mohamed Hamdan Dagalo. Le conflit a transformé le Soudan en ce que l’ONU qualifie désormais de « pire crise humanitaire et de déplacement au monde ».

Idriss K. Sow Illustration d'après photo
Journaliste-essayiste mauritano-guinéen, il parcourt depuis une décennie les capitales et les villages d’Afrique pour chroniquer, en français, les réalités politiques, culturelles et sociales de l'Afrique
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