
Correctif : Dans la journée, CMA CGM nous a fait parvenir des informations sur la décision de poursuivre ses services de transport à destination du Mali après un échange avec les Autorités du pays.
Lire le Rectificatif : CMA CGM maintient ses services vers le Mali
Le groupe français CMA CGM a annoncé la suspension « temporaire » de ses services routiers à destination du Mali, invoquant la pénurie de carburant et la dégradation des conditions de sécurité sur les principaux corridors ouest-africains. Cette décision, qui survient dans un contexte d’instabilité régionale, menace de désorganiser davantage les flux d’importation du pays enclavé.
Dans une note adressée à ses clients début novembre 2025, CMA CGM a indiqué interrompre l’acheminement de ses cargaisons par voie terrestre vers le Mali depuis les ports d’Abidjan, de Dakar, de Tema (Ghana) et de Conakry. La mesure est présentée comme « temporaire », mais ses effets se font déjà sentir dans les chaînes d’approvisionnement, notamment pour les importateurs maliens de produits alimentaires, de matériaux de construction et d’intrants industriels.
Cette décision intervient alors que le groupe français venait tout juste d’ajuster sa « Inland Emergency Surcharge » (IES) — la surtaxe appliquée aux conteneurs à destination du Mali qui est passée de 1 650 € à 250 € par conteneur au 1er octobre 2025. Une réduction interprétée comme un réajustement face à la baisse d’activité et à la montée des risques opérationnels.
Carburant rare et insécurité croissante
Dans son communiqué, CMA CGM évoque deux raisons principales : la rareté du carburant sur les corridors régionaux et la détérioration de la sécurité routière.
Les routes reliant les ports côtiers au Mali notamment le corridor Abidjan-Bamako, sont régulièrement affectées par des pénuries d’essence, des attaques armées et des barrages informels. Ces difficultés allongent les délais de transport et font grimper les coûts logistiques, mettant en péril la rentabilité des services terrestres.
« Entre les risques d’attaque, les pannes dues au manque de carburant et les frais imprévus, le transport vers Bamako est devenu une véritable loterie », confie un opérateur basé à Abidjan.
Un signal préoccupant pour Bamako
Le retrait de CMA CGM, même temporaire, envoie un message préoccupant aux acteurs économiques maliens.
Les entreprises locales, déjà confrontées à la hausse du dollar et aux tensions sur les importations, redoutent des retards supplémentaires et des surcoûts liés à la nécessité de trouver d’autres transporteurs.
Pour un pays enclavé comme le Mali, dépendant à 80 % de ses importations, la suspension d’un acteur majeur du fret international représente une menace directe pour la stabilité des prix et la disponibilité de nombreux produits.
Les observateurs craignent aussi un effet domino : d’autres compagnies logistiques pourraient imiter CMA CGM, réduisant encore les options d’acheminement régulier vers Bamako.
Une stratégie globale de recentrage
Ce retrait s’inscrit dans une logique plus large de réévaluation des corridors logistiques africains par CMA CGM, devenu un acteur mondial du transport intégré après le rachat de Bolloré Logistics.
Le groupe restructure actuellement ses routes terrestres en privilégiant les axes plus sûrs et plus rentables, notamment en Afrique de l’Est et du Nord.
Cette réorganisation traduit une tendance de fond : les grands groupes internationaux hésitent de plus en plus à maintenir des opérations dans des zones jugées « à haut risque », malgré leur importance stratégique.
Bamako face à ses vulnérabilités
Pour le Mali, la décision de CMA CGM met en lumière une dépendance logistique chronique.
Le pays devra accélérer la diversification de ses routes commerciales, en misant notamment sur le corridor mauritanien via Nouakchott ou sur le réseau ferroviaire régional en projet avec le Burkina Faso et le Niger.
Les autorités maliennes sont également appelées à renforcer la sécurité sur les axes routiers et à garantir l’approvisionnement en carburant, sous peine de voir s’effondrer des pans entiers de son économie d’importation.



