
Le Président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a entamé, ce mardi, une visite de travail de deux jours au Bénin. Reçu dès son arrivée par son homologue béninois, les deux dirigeants ont abordé des questions de coopération bilatérale mais aussi d’intérêt pour la sous-région.
En visite de travail de deux jours à Cotonou, le Président sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son homologue béninois Patrice Talon ont annoncé leur volonté commune de « donner un nouveau souffle » à l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), confrontée à une crise institutionnelle et géopolitique inédite. Dans une déclaration conjointe à la presse, les deux dirigeants ont affirmé leur intention d’entreprendre des démarches dès les prochains jours pour insuffler un nouveau dynamisme à l’organisation, ébranlée par le climat de défiance régionale. « Nous avons parlé de l’UEMOA qui traverse aussi une situation quelque peu difficile qu’il nous faut rapidement redresser », a déclaré le Président sénégalais à l’issue d’un tête-à-tête avec Patrice Talon au palais de la Marina.
Une organisation menacée
L’UEMOA, qui regroupe huit pays d’Afrique de l’Ouest partageant le franc CFA – le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo – est fragilisée par les séismes politiques provoqués par une série de coups d’État militaires au Sahel. En effet, le Mali, le Niger et le Burkina Faso, désormais membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont rompu avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et menacent de prendre leurs distances également avec l’UEMOA.
Ces tensions ont récemment éclaté au grand jour lors de la 2e session ordinaire du Conseil des ministres de l’UEMOA, tenue à Lomé début juillet, que les trois pays sahéliens ont quitté avant sa clôture. Motif : le refus de leur attribuer la présidence tournante, qui devait revenir au Burkina Faso, selon eux. L’Agence d’information du Burkina a dénoncé une « absence de consensus » et un climat de marginalisation des membres de l’AES.
Médiation et diplomatie active
Au-delà des tensions institutionnelles, les relations diplomatiques se sont durcies. Les trois États sahéliens accusent le Bénin et la Côte d’Ivoire – considérés proches des positions de la CEDEAO – de comploter contre eux, ce que ces derniers ont toujours catégoriquement nié. Le fossé semble s’élargir avec le projet des pays de l’AES de créer leur propre monnaie commune, ce qui remettrait en cause l’architecture monétaire actuelle de l’UEMOA fondée sur le franc CFA.
Face à cette crise, Bassirou Diomaye Faye, désigné en juillet 2024 comme médiateur de la CEDEAO pour renouer les liens avec les régimes militaires du Sahel, veut désormais agir aussi sur le terrain de l’UEMOA. Son déplacement à Cotonou témoigne de cette volonté d’initier une nouvelle dynamique régionale, en s’appuyant sur un partenaire influent comme Patrice Talon. « Nous avons convenu, le Président Talon et moi, dans les tout prochains jours d’entreprendre des démarches pour travailler à redynamiser l’organisation, à lui donner un nouveau souffle, bien évidemment avec le soutien des autres homologues membres de l’Union », a précisé le chef de l’État sénégalais.
Une visite placée sous le signe de l’intégration
Le Président Diomaye Faye est arrivé dans l’après-midi du 15 juillet à l’aéroport international Cardinal Bernardin Gantin de Cotonou, accueilli par le ministre béninois des Affaires étrangères, Olushegun Adjadi Bakari. Quelques membres de la communauté sénégalaise au Bénin lui ont réservé un accueil chaleureux. Après les salutations protocolaires, le Président du Sénégal s’est rendu directement au palais présidentiel pour entamer ses entretiens avec Patrice Talon.
Sa visite, bien que brève, revêt une importance stratégique. Elle s’inscrit dans une série d’initiatives diplomatiques visant à préserver l’unité de la région ouest-africaine dans un contexte de rupture progressive entre les blocs politiques et économiques de la CEDEAO, de l’UEMOA et de l’AES.
La déclaration des Présidents sénégalais et béninois pourrait ouvrir la voie à une réforme de l’UEMOA, voire à une révision de ses mécanismes de gouvernance et de prise de décision. Le défi est de taille : restaurer la cohésion régionale, préserver la stabilité monétaire, et réconcilier des visions de plus en plus divergentes sur l’intégration économique.