
Du 4 au 10 septembre 2025, Alger accueille pour la première fois la Foire Commerciale Intra-Africaine (IATF2025, Intra African Trade Fair 2025), coorganisée avec la Banque Africaine d’Import-Export (Afreximbank), en collaboration avec la Commission de l’Union Africaine et le Secrétariat de la ZLECAf. Le plus gros événement économique d’Afrique rassemble à la fois chefs d’Etat et décideurs économiques, autour d’un salon spectaculaire où les plus grandes entreprises africaines sont réunies.
C’est dans le cadre impressionnant du Centre International de Conférences Abdelatif Rahal, situé au Club des Pins, dans l’immédiate périphérie de la capitale algérienne, que s’est tenue le 4 septembre 2025 au matin l’ouverture officielle de l’IATF 2025, au moment précis où l’économie mondiale prend un virage décisif, transformant radicalement les enjeux industriels et financiers du continent africain.
Le renversement des fondamentaux économiques mondiaux
En effet l’arrivée de Donald Trump au pouvoir a conduit les Etats-Unis d’Amérique a des choix qui remettent radicalement en cause à la fois la logique géopolitique multilatéraliste héritée du deuxième conflit mondial, mais aussi la doctrine économique libre-échangiste que la première puissance économique mondiale défendait jusque-là au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce. Soudain, la pratique protectionniste violente imposée par les USA change la donne et fait tomber les masques. Tous les pays du monde doivent repenser leurs relations commerciales dans un cadre où la guerre économique retrouve les principes du chacun pour soi, avec prime au plus puissant. Pour l’Afrique c’est à la fois une douche froide et l’occasion d’un sursaut.
L’enjeu d’une ambition économique continentale intégrée
L’Afrique ne peut plus concevoir son développement en s’appuyant sur le commerce avec les autres continents, qui constitue encore pour l’essentiel (plus de 80%) l’orientation de ses échanges. Il devient crucial d’engager toutes les économies africaines dans une démarche de croissance endogène, appuyée sur un fort développement des échanges au sein même du continent, qui doivent devenir le premier levier de sa croissance. L’organisation à Alger de l’IATF 2025 constitue de ce point de vue à la fois une prise de conscience accélérée des nouveaux enjeux de développement du continent africain et un moment de mobilisation générale.

Les priorités africaines recoupent les actions déjà engagées par l’Algérie dans le sens d’une plus grande intégration économique au sein de la Zone de Libre-échange Africaine, avec en particulier la réalisation de nouvelles infrastructures essentielles à cette dynamique, qu’il s’agisse d’axes autoroutiers continentaux transnationaux, d’infrastructures portuaires, ou d’infrastructures énergétiques à l’échelon continental, comme le gazoduc Nigéria-Algérie. Le fait que l’IATF se tienne cette année à Alger est donc particulièrement opportun.
Une dynamique autonome pour la croissance africaine
Plus encore, le modèle algérien d’une économie autonome, s’affranchissant au maximum des dépendances extérieures pour concevoir son développement de manière autonome et intrinsèque, appuyée sur la valorisation des ressources naturelles dont disposent de nombreux pays africains, sur une politique agricole et agro-alimentaire ambitieuse, et sur une industrialisation tous azimuts, devient de facto une référence pour un grand nombre de pays africains.

Si la deuxième moitié du vingtième siècle avait été celle des indépendances politiques, les premières décennies du vingt-et-unième siècle sont celles de la construction à marche forcée des indépendances économiques vis-à-vis des pays du Nord, anciennement colonisateurs. L’IATF 2025 est le cadre naturel de cette prise de conscience salvatrice, à laquelle le continent africain ne peut plus échapper.
L’engagement personnel d’Abdelmadjid Tebboune
Le discours d’ouverture de ce marché hors-norme, prononcé par le Président Abdelmadjid Tebboune, parfaitement calubré, a été d’une profonde clarté. Mettant d’abord en évidence le retard accusé par l’Afrique dans le développement des échanges intra-africains, qui ne constituent aujourd’hui encore qu’une part minime de leur Produit National Brut, alors que ces échanges internes au continent constituent par exemple en Europe plus de la moitié des recettes économiques de l’ensemble des pays européens, le président algérien a naturellement tracé la priorité à donner désormais au développement du marché intra-africain.
Mettant ensuite en avant les orientations décisives prises par l’Algérie dans ce domaine, que ce soit en effaçant plus d’un milliard et demi de dettes contractées à son égard par divers pays du continent, que ce soit en investissant fortement dans des infrastructures de communication et de transport destinées à faciliter l’accélération de la croissance des échanges commerciaux et énergétiques, le président Abdelmadjid Tebboune a marqué avec force l’engagement de l’Algérie dans cette dynamique de développement endogène au continent.
Sont également apparus avec force la dimension affective et l’attachement du président algérien à l’enjeu prioritaire que constitue la réduction des dépendances africaines à l’égard de puissances extérieures à l’Afrique, l’Algérie ayant fait des valeurs d’indépendance et de solidarité panafricaine une constante de sa politique étrangère depuis les années 1960.
Pour les milliers de décideurs économiques rassemblés à Alger, cette première journée a donc été celle d’une mobilisation collective dont témoigneront dans les prochains jours les multiples contrats attendus dans des domaines aussi différents que les industries extractives et minières, les industries lourdes, l’agriculture, les infrastructures énergétiques et de transport, les nouvelles technologies tout comme les industries culturelles et créatives, qui sont aussi aujourd’hui l’un des secteurs où l’Afrique doit reconquérir son autonomie, pour préserver la richesse de ses identités, à l’heure de la mondialisation des réseaux sociaux.