
En Afrique du Sud, l’inhumation de 30 corps anonymes d’orpailleurs illégaux jette une lumière crue sur un drame humanitaire au cœur des mines abandonnées. Entre accusations de négligence policière et l’ombre d’un trafic minier mafieux, ce scandale révèle la face sombre de l’exploitation aurifère clandestine.
L’inhumation de trente corps non identifiés a eu lieu ce mardi dans un climat mêlant douleur, silence et indignation. Ces dépouilles faisaient partie des 78 corps retrouvés en janvier 2025 dans une ancienne mine d’or abandonnée près de Stilfontein, dans la province du Nord-Ouest sud-africain. Les cérémonies funéraires ont été organisées à Jouberton, Klerksdorp et Kanana, dans la région des Orcades, avec l’assistance des autorités sanitaires locales. Un hommage tardif pour des vies brisées dans l’ombre d’un système minier parallèle, où l’exploitation illégale est devenue un piège mortel.
L’ombre d’un drame humanitaire sous terre
Le drame était survenu en janvier lors d’une vaste opération policière visant à démanteler un réseau d’exploitation minière illégale. En plus des 78 corps extraits, les forces de l’ordre avaient secouru 246 survivants, enfermés sous terre dans des conditions déplorables. Vingt-cinq corps ont depuis pu être rendus à leurs familles grâce à des tests ADN, mais seuls 12 avaient été formellement identifiés au mois d’avril. Pour les autres, aucune réclamation, aucun nom, seulement des cercueils anonymes pour refermer une page sombre.
Les circonstances de cette tragédie restent controversées. Plusieurs voix issues de la société civile, de partis d’opposition et des familles de victimes ont accusé les forces de l’ordre d’avoir délibérément affamé les mineurs en bloquant les entrées de la mine et en restreignant l’acheminement de vivres, afin de les contraindre à sortir. La police, de son côté, rejette fermement ces allégations, pointant du doigt les gangs criminels qui, selon elle, contrôlaient l’accès à la nourriture et retenaient les mineurs contre leur gré. Malgré les demandes insistantes, aucune commission d’enquête officielle n’a encore été constituée.
Le mystère de « Tiger », figure fantomatique du trafic minier
Au cœur de cette affaire macabre se dresse la silhouette insaisissable d’un homme connu sous le nom de Tiger, de son vrai nom James Neo Tshoaeli, originaire du Lesotho. Soupçonné d’être le cerveau des opérations illégales de la mine, il a disparu depuis janvier, échappant à une chasse à l’homme lancée par la police sud-africaine. Son évasion, facilitée par quatre policiers aujourd’hui poursuivis en justice, ajoute une couche d’opacité à une affaire déjà sulfureuse. Son arrestation pourrait être la clé pour comprendre l’ampleur du trafic humain et les responsabilités dans ce scandale minier.
Alors que vingt autres corps attendent encore une sépulture d’ici fin juin, la société sud-africaine reste tiraillée entre compassion et colère. Ce drame est révélateur de la vulnérabilité des migrants et la violence systémique d’un secteur minier clandestin, où l’or vaut plus que des vies humaines.