Un nouveau massacre à Al-Nahud plonge le Soudan dans une guerre fratricide à l’ombre de l’indifférence


Lecture 4 min.
Déplacés au Soudan
Des déplacés au Soudan

Les autorités soudanaises accusent les Forces de soutien rapide (FSR) d’avoir massacré 300 civils lors d’attaques ethniques. Les FSR ont ensuite pris Al-Khuwei et contrôlent désormais une large partie du Kordofan-Ouest. La diplomatie soudanaise dénonce des crimes contre l’humanité et interpelle l’ONU. Depuis avril 2023, le conflit a fait entre 20 000 et 130 000 morts et 15 millions de déplacés.

Le ministère soudanais des Affaires étrangères a accusé les Forces de soutien rapide (FSR) d’avoir perpétré un massacre d’environ 300 civils à Al-Nahud, dans l’État du Kordofan-Ouest, lors d’attaques menées sur une base ethnique. Les FSR, qui n’ont pas réagi à ces accusations, ont toutefois annoncé la prise d’Al-Khuwei, après s’être emparées d’Al-Nahud, contrôlée auparavant par l’armée. Al-Nahud avait été désignée capitale administrative temporaire du Kordofan-Ouest après la perte d’Al-Fula au profit des FSR.

Une guerre fratricide dévastatrice

Le ministère a dénoncé les crimes contre l’humanité et les opérations de nettoyage ethnique commises par les FSR et a exhorté le Conseil de sécurité de l’ONU à abandonner son approche jugée trop indulgente. Depuis le déclenchement du conflit le 15 avril 2023, les FSR affrontent l’armée pour le contrôle du pays. Le Soudan, jadis unifié sous un gouvernement central, est aujourd’hui plongé dans un conflit fratricide qui a dévasté le pays depuis avril 2023.

Le pays est déchiré par une guerre civile opposant les Forces armées soudanaises (FAS), dirigées par le général Abdel Fattah al-Burhane, aux Forces de soutien rapide (FSR), une milice paramilitaire dirigée par son ancien allié, Mohamed Hamdan Daglo, surnommé Hemedti. Cette guerre a causé des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et une crise humanitaire d’une ampleur sans précédent.

Aux origines du conflit

Les racines du conflit remontent à la période précédant la chute du dictateur Omar el-Béchir en 2019, après des mois de manifestations populaires. La transition vers un gouvernement civil a été marquée par des tensions entre les militaires et les civils. En 2021, un coup d’État militaire a renversé le gouvernement de transition, exacerbant les divisions internes.

Les tensions entre les FAS et les FSR ont culminé en avril 2023, lorsque des affrontements ouverts ont éclaté, marquant le début de la guerre civile actuelle. Les FAS sont l’armée nationale régulière du Soudan, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane. Elles ont longtemps été l’institution militaire dominante du pays. Depuis le début du conflit, elles ont cherché à maintenir leur contrôle sur les régions stratégiques, notamment l’est et le nord du pays.

L’une des pires crises humanitaires

Les FSR sont une milice paramilitaire formée à partir des Janjawids, des milices arabes responsables de violences au Darfour dans les années 2000. Dirigées par Mohamed Hamdan Daglo, alias Hemedti, les FSR ont acquis une influence considérable, notamment dans l’ouest du pays, y compris le Darfour. Elles ont été accusées de commettre des atrocités contre les civils, notamment des massacres ethniques, des viols et des déplacements forcés. Le conflit a provoqué l’une des pires crises humanitaires au monde. Plus de 12 millions de personnes ont été déplacées, dont 3,4 millions ont fui vers les pays voisins.

La famine touche désormais cinq régions, dont trois dans le Darfour-Nord, et devrait s’étendre à cinq autres districts d’ici mai. La malnutrition aiguë sévère affecte des centaines de milliers d’enfants, avec environ 431 000 hospitalisés en 2024, soit une augmentation de 44% par rapport à l’année précédente. Les deux camps sont accusés de commettre des violations graves des droits de l’homme. Les FSR, en particulier, sont responsables de massacres ethniques, de viols, de tortures et de déplacements forcés.

L’ONU et l’UA préoccupées face à une situation chaotique

Des rapports de l’ONU et d’Amnesty International documentent des cas de violences sexuelles généralisées, y compris des viols collectifs, des enlèvements et des actes d’esclavage sexuel. Les Nations Unies ont exprimé leur préoccupation face à la situation au Soudan. Le Conseil de sécurité a renouvelé l’embargo sur les armes au Darfour, bien que cet embargo soit largement contourné.

Des experts de l’ONU ont dénoncé des « tactiques pour affamer » 25 millions de civils, soulignant que 97% des personnes déplacées sont confrontées à des niveaux sévères de faim. L’Union Africaine a qualifié la guerre au Soudan de « pire crise humanitaire au monde ». Elle a appelé à un dialogue politique inter-soudanais pour mettre fin au conflit, soulignant que seule une solution politique, et non militaire, peut apporter la paix.

Avatar photo
Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News