
La Banque mondiale tire la sonnette d’alarme sur l’économie tunisienne dans son dernier rapport publié le 11 juin. L’institution financière internationale maintien ses projections de croissance à la baisse pour 2025 et 2026, mettant en lumière les fragilités structurelles persistantes du pays et l’urgence de réformes économiques majeures.
L’économie tunisienne s’enlise dans une spirale de faible croissance. Selon les nouvelles estimations de la Banque mondiale, le PIB du pays ne progressera que de 1,9 % en 2025, avant de ralentir davantage à 1,6 % en 2026. Cette révision à la baisse par rapport aux prévisions de début d’année témoigne des difficultés croissantes de la Tunisie à retrouver un rythme de développement économique soutenu.
Ces projections interviennent dans un contexte international défavorable, marqué par un ralentissement de l’économie mondiale, des tensions géopolitiques persistantes et une volatilité accrue des marchés financiers. Toutefois, les maux de l’économie tunisienne dépassent largement ces facteurs externes.
Le pays souffre d’un investissement public anémique, d’une dépendance excessive à l’endettement extérieur et d’un secteur privé qui peine à jouer son rôle de moteur de croissance. Cette combinaison toxique limite considérablement les perspectives de redressement économique.
L’impasse des réformes structurelles
Malgré les déclarations d’intention des autorités, les réformes de fond restent lettre morte. Les chantiers prioritaires – réforme fiscale, système de retraites, rationalisation des subventions – accumulent les retards.
Cette inertie réformatrice a des conséquences directes sur la crédibilité internationale de la Tunisie. La Banque mondiale souligne que cette lenteur érode dangereusement la confiance des investisseurs et hypothèque la capacité du pays à obtenir un soutien financier international. L’accord avec le Fonds monétaire international (FMI), négocié depuis des mois, demeure ainsi suspendu aux bonnes volontés politiques.
Un cercle vicieux social et économique
L’atonie économique nourrit un cercle vicieux préoccupant. Avec une croissance aussi faible, la Tunisie ne peut espérer réduire significativement son taux de chômage, particulièrement critique chez les jeunes diplômés où il dépasse les 35 %. Cette situation génère des tensions sociales croissantes dans un pays déjà fragilisé politiquement.
Parallèlement, l’inflation persistante – estimée à 8,4 % en 2024 – continue d’éroder le pouvoir d’achat des ménages. La combinaison d’une croissance faible et d’une hausse continue des prix, notamment des produits de première nécessité, accentue la précarité de larges pans de la population tunisienne.
Des marges de manœuvre quasi inexistantes
L’analyse de la Banque mondiale met en évidence la marge de manœuvre budgétaire extrêmement réduite dont dispose la Tunisie. Sans soutien financier externe massif, le pays ne peut envisager de politique de relance ambitieuse. Cette contrainte place les autorités dans une situation délicate où elles doivent « concilier impératifs sociaux et assainissement budgétaire« , selon les termes du rapport.
L’institution internationale appelle néanmoins à des réformes « progressives mais crédibles« , suggérant qu’une approche graduelle pourrait permettre de sortir de l’impasse actuelle tout en préservant la cohésion sociale.
Les indicateurs économiques clés
Croissance 2024 : 1,4 %
Prévision 2025 : 1,9 %
Prévision 2026 : 1,6 %
Taux d’inflation 2024 : ~8,4 % mais en baisse à 5,6 % en avril 2025
Chômage des jeunes : >35 %
Dette publique : Plus de 80% du PIB mais un déficit qui s’est réduit à 5,8 % du PIB en 2024