Trésors retrouvés : l’Afrique reconquiert son patrimoine pillé


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Tambour parleur
Tambour parleur

Le Bénin célèbre en mai 2025 la restitution d’un objet royal d’une grande valeur symbolique : un kataklè, siège royal à trois pieds, appartenant au trésor du royaume d’Abomey. Pillé en 1892 lors de la conquête française, il était conservé en Finlande après un échange muséal méconnu avec la France en 1939.

Redécouvert au Musée national finlandais grâce à une enquête conjointe menée par l’historienne de l’art Marie-Cécile Zinsou et la conservatrice Pilvi Vainonen, le kataklè rejoint désormais les 26 premières pièces restituées par la France en 2021, illustrant la lente mais importante restitution du patrimoine africain.

Symboles de justice et de mémoire

Cette restitution s’inscrit dans un mouvement global de retour des œuvres et objets spoliés pendant la colonisation. À Madagascar, une délégation officielle a engagé en 2024 des discussions avec la France pour obtenir le retour du crâne du roi Sakalava Toera, exécuté par les forces coloniales. Cette démarche vise à honorer les ancêtres et à panser les blessures du passé.

L’enjeu est également légal et éthique : une loi française de 2023 autorise la restitution de restes humains prélevés dans des conditions jugées indignes. Un comité scientifique est chargé de superviser ces restitutions sensibles, en lien étroit avec les descendants des figures historiques concernées.

L’Éthiopie récupère ses trésors préhistoriques

La France a remis en décembre 2024 à l’Éthiopie environ 3 500 objets archéologiques, issus du site de Melka Kunture, étudiés depuis les années 1980. Ce geste marque une reconnaissance de l’importance historique de l’Afrique dans l’histoire de l’humanité.

Un projet de coopération, Patrimoine durable en Éthiopie, accompagne ce retour. Il prévoit la conservation de sites importants comme Lalibela et symbolise une volonté partagée de valorisation du patrimoine culturel africain.

Le tambour sacré Ebrié reprend la parole

En Côte d’Ivoire, c’est le Djidji Ayôkwé, tambour sacré des Ebrié, qui fait l’objet d’une restitution hautement symbolique. Retiré de son contexte culturel durant la période coloniale, il retrouve sa terre d’origine après des négociations entamées il y a plus de trois ans.

Ce tambour, autrefois utilisé pour la communication à distance, sera d’abord exposé temporairement en France avant son transfert à Abidjan. Il occupera une place centrale dans un musée dédié au patrimoine national ivoirien.

Les résistants algériens enfin honorés

L’Algérie, de son côté, a vu le retour en 2020 des crânes de 24 résistants tués durant la conquête coloniale française, dont Cheikh Bouziane. Conservés pendant plus d’un siècle au Muséum national d’histoire naturelle, ces restes retrouvent enfin leur pays pour y être inhumés dignement.

Lire aussi : La France restitue au Bénin 26 œuvres volées en 1892 au Dahomey

Cette restitution a été saluée comme une reconnaissance des souffrances subies par les peuples colonisés. Elle constitue un moment fort dans le processus de mémoire et de réconciliation entre la France et l’Algérie.

Vers une nouvelle ère de coopération patrimoniale

Ces initiatives de restitution ne sont pas des gestes isolés, mais le reflet d’un changement de paradigme dans les relations entre pays africains et ex-puissances coloniales. L’objectif est clair : réparer les injustices du passé et construire des partenariats culturels équitables.

Au-delà des objets eux-mêmes, ces retours redonnent aux pays africains un pan essentiel de leur identité, tout en ouvrant la voie à des projets éducatifs, muséaux et mémoriels d’envergure. La reconquête du patrimoine devient ainsi un levier de renaissance culturelle.

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Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
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