
Le Conseil des imams de Tanzanie a dénoncé les meurtres de civils survenus après les élections du 29 octobre, attribués aux forces de sécurité. Par la voix du cheikh Issa Ponda, les autorités religieuses musulmanes exigent une enquête indépendante et une refonte politique profonde.
La vague de condamnations internationales et nationales concernant les violences qui ont suivi les élections contestées du 29 octobre en Tanzanie vient de s’étendre au plus haut niveau des autorités religieuses musulmanes. Le Conseil des imams de Tanzanie a fermement dénoncé les meurtres de civils imputés aux forces de sécurité et exige une refonte politique profonde pour restaurer la justice et la dignité humaine dans le pays.
Une condamnation sans équivoque
Lors d’un discours prononcé samedi 15 novembre, le cheikh Issa Ponda, représentant du Conseil des imams, a « fermement » condamné « les meurtres de personnes innocentes lors des élections ». Cette intervention, qui a un poids considérable dans un pays où la religion joue un rôle essentiel, vient confirmer l’ampleur de la répression sanglante qui a frappé les manifestations contre le régime de la présidente Samia Suluhu Hassan.
Les imams ont évoqué des morts survenues non seulement dans la rue, mais également au domicile ou sur les lieux de travail des victimes. Cette déclaration fait écho aux chiffres avancés par l’opposition et les associations, qui estiment à plus de 1 000 le nombre de personnes tuées dans la foulée des scrutins présidentiel et législatif.
Irregularités massives et climat politique explosif
Le Conseil des imams ne s’est pas limité à dénoncer les violences, il a également fustigé les irrégularités massives qui ont entaché les élections du 29 octobre. Leurs observateurs auraient documenté des fraudes, notamment la présence de milliers de noms de personnes décédées sur les registres électoraux, des cas de bourrage d’urnes et l’absence de dépouillement dans la majorité des bureaux de vote.
Ces constats renforcent les soupçons de manipulation du scrutin, qui a crédité la présidente sortante, Samia Suluhu Hassan, de près de 98 % des voix, dans un contexte où ses principaux adversaires avaient été soit emprisonnés, soit disqualifiés. Alors que de nombreuses familles continuent d’enterrer leurs morts ou de rechercher leurs proches disparus, la présidente a promis la création d’une commission d’enquête sur les violences.
Appel à une enquête indépendante et une nouvelle Constitution
L’intervention du Conseil des imams s’ajoute aux critiques déjà formulées par l’Église catholique. La semaine dernière, 41 évêques tanzaniens avaient déjà condamné les « assassinats brutaux » et exigé une enquête indépendante incluant des experts nationaux et internationaux. Un prêtre, le père Charles Kitima, avait même été violemment agressé après avoir publiquement dénoncé un « régime totalitaire ».
Face à cette crise de confiance, les imams réclament une nouvelle Constitution, un retour à la justice et la restauration de la dignité humaine. Malgré les tentatives d’apaisement de la présidente, qui s’est dite « très attristée » par les morts, les appels à manifester le 9 décembre continuent d’inonder les réseaux sociaux, témoignant d’une crise politique et sociale profonde en Tanzanie.




