
La police tanzanienne a interdit toute manifestation prévue pour le jour de l’indépendance. Cette décision révèle un durcissement politique inédit depuis les élections contestées du 29 octobre. L’ONU alerte déjà sur une répression aiguë des libertés, alors que le pays fait face à un climat de violence et d’opacité inédit.
La police tanzanienne a déclaré illégale et interdit toute manifestation prévue pour le 9 décembre, jour de la fête nationale. Cette décision, annoncée par le porte-parole David Misime, intervient dans un contexte de forte tension politique et de répression croissante, soulevant de vives inquiétudes quant au respect des libertés fondamentales dans le pays.
Un prétexte légal au milieu d’un climat de tension
L’interdiction des rassemblements, qui devaient marquer la commémoration de l’indépendance de la Tanzanie, a été justifiée par l’absence de « notification officielle » de la part d’organisateurs identifiables. Les autorités ont expliqué que, « compte tenu des tactiques illégales constatées », les appels à manifester relayés sur les réseaux sociaux ne permettaient plus de satisfaire aux « conditions légales pour être autorisé ».
Cette mesure inédite s’inscrit dans une période particulièrement répressive depuis les élections générales du 29 octobre, dont les résultats sont contestés par l’opposition. Si les organisateurs de la manifestation, qui entendaient protester contre des mesures gouvernementales controversées, n’ont pas encore réagi, l’interdiction est perçue comme un durcissement sans précédent du pouvoir.
L’ONU alerte sur la répression aiguë des droits
À quatre jours de l’échéance, l’Organisation des Nations Unies (ONU) a pressé les autorités tanzaniennes de garantir les libertés fondamentales. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) juge les mesures de sécurité mises en place – durcissement de la sécurité urbaine, restrictions sur la vente de carburant, et élargissement de la surveillance numérique, comme excessives.
« Ces mesures risquent d’exacerber les tensions au sein de la population et portent gravement atteinte aux droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et de participation aux affaires publiques », a déclaré Seif Magango, porte-parole du HCDH, depuis Genève. L’ONU a rappelé aux forces de sécurité leur obligation de s’abstenir de tout recours à la force contre des rassemblements non violents, insistant que l’usage de la force doit être limité au « strict minimum nécessaire ».
Bilan lourd et opacité officielle
L’appel de l’ONU intervient alors que des rapports alarmants font état d’une répression sévère post-électorale. Selon l’opposition et des ONG, plus d’un millier de personnes auraient été tuées et des centaines d’autres arrêtées depuis la mi-novembre. Des dizaines de personnes, dont des universitaires, des acteurs de la société civile et des responsables politiques locaux, auraient été placées en détention, parfois par des agents armés non identifiés.
Cinq semaines après le scrutin, les autorités de Dodoma n’ont toujours fourni aucune donnée officielle sur le nombre de morts, les circonstances des décès ou les allégations de disparitions forcées. Face à ce silence, le HCDH a également mis en garde contre les restrictions arbitraires d’accès aux médias et aux plateformes de réseaux sociaux.




