Tamazight pour tous : l’Algérie étend son engagement linguistique à sa diaspora


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Le Président algérien, Abdelmadjid Tebboune
Le Président algérien, Abdelmadjid Tebboune

Le Gouvernement algérien renforce sa politique linguistique en valorisant Tamazight auprès de sa diaspora. Une rencontre entre le Haut-commissariat à l’amazighité et le secrétariat d’État chargé de la Communauté à l’étranger marque cette volonté d’enseignement structuré hors des frontières. Programmes éducatifs, ateliers culturels et contenus modernes seront déployés via les réseaux diplomatiques. En rendant vivante cette langue constitutive de l’identité algérienne, le gouvernement entend tisser un lien fort entre les jeunes Algériens à l’étranger et leurs racines culturelles et linguistiques.

L’Algérie vient de poser un nouveau jalon dans sa politique de valorisation de la langue amazighe. Le gouvernement algérien ambitionne désormais de faire rayonner Tamazight au-delà de ses frontières, en mettant en place un enseignement structuré destiné aux Algériens établis à l’étranger. Cette volonté forte s’est illustrée récemment par une rencontre officielle entre M. Sofiane Chaïb, secrétaire d’État chargé de la Communauté nationale à l’étranger, et M. Si El Hachemi Assad, secrétaire général du Haut-commissariat à l’amazighité (HCA).

Ce rapprochement stratégique vise à permettre aux enfants de la diaspora algérienne d’apprendre Tamazight, une langue qui incarne l’un des fondements de l’identité nationale algérienne. En misant sur cet apprentissage, l’Algérie entend raffermir les liens culturels et linguistiques entre les nouvelles générations d’Algériens à l’étranger et leur pays d’origine, tout en réaffirmant que l’amazighité est un élément constitutif de l’Algérianité.

Des actions concrètes pour rapprocher les jeunes de leurs racines

Lors de cette rencontre, plusieurs pistes concrètes ont été évoquées : création de programmes éducatifs spécifiques, élaboration de contenus pédagogiques modernes, et implication directe des représentations diplomatiques et consulaires dans la mise en œuvre du projet. Cette approche multi-institutionnelle permettra de toucher un large public, en s’adaptant aux réalités culturelles et scolaires des pays d’accueil.

Le gouvernement algérien entend aussi mobiliser ses établissements culturels à l’étranger pour proposer des ateliers, des cours en ligne et des événements qui mettront en valeur Tamazight. Cette stratégie vise non seulement à enseigner la langue, mais aussi à éveiller un sentiment d’appartenance chez les jeunes Algériens nés ou élevés loin de leur terre d’origine. En rendant Tamazight vivante et accessible, les autorités algériennes entendent construire un pont entre générations et continents.

Tamazight : une langue vivante au cœur de la mémoire collective

Ce projet ambitieux traduit une reconnaissance officielle de l’importance de l’amazighité dans la construction identitaire de l’Algérie moderne. Depuis sa constitutionnalisation en 2016 comme langue nationale et officielle, Tamazight a fait l’objet d’un intérêt croissant, aussi bien sur le territoire national qu’au sein de la diaspora. Enseigner cette langue aux enfants d’Algériens vivant à l’étranger, c’est réaffirmer son rôle de vecteur de mémoire, de culture et d’unité.

À travers cette initiative, l’Algérie adresse un message fort : la diversité linguistique est une richesse qu’il convient de protéger et de transmettre, peu importe la distance géographique. Le Haut-commissariat à l’amazighité, fort de son expertise en matière de linguistique et de pédagogie, joue un rôle central dans cette entreprise. Il prévoit d’élaborer du matériel didactique de qualité, pensé pour capter l’attention des jeunes tout en respectant les normes académiques internationales.

Le HCA, moteur linguistique de la diaspora amazighe

L’enjeu est double : favoriser un apprentissage efficace et susciter l’intérêt chez une génération qui évolue dans un contexte numérique et multiculturel. Dans les mois à venir, les premières réalisations concrètes de cette coopération devraient voir le jour. Des partenariats avec les associations algériennes à l’étranger seront aussi encouragés, afin de créer des espaces de dialogue, de découverte et d’expression autour de la langue et de la culture amazighes.

Cette démarche inclusive et participative témoigne de la volonté de l’État algérien de faire de la diaspora un acteur clé du rayonnement culturel national. L’enseignement de Tamazight à l’étranger s’inscrit dans la continuité des mesures prises ces dernières années à l’intérieur du pays. En Algérie, plusieurs wilayas ont vu l’introduction progressive de Tamazight dans les écoles primaires, avec un élargissement progressif du nombre d’enseignants formés et du nombre de bénéficiaires.

Des contextes contrastés à l’international

En 2021, le HCA avait lancé une campagne nationale pour inciter les jeunes à apprendre la langue, avec le soutien du ministère de l’Éducation nationale. Certaines universités algériennes proposent également des formations diplômantes en langue et culture amazighes, notamment à Tizi Ouzou, Béjaïa ou Batna, consolidant ainsi la légitimité académique de Tamazight.

À l’international, d’autres pays ont connu des expériences similaires ou divergentes. Le Maroc, par exemple, a inscrit l’amazigh dans sa Constitution en 2011 et développe également des programmes éducatifs pour la diaspora, notamment en Europe. Cependant, le niveau de structuration et la coordination entre les différentes institutions marocaines et les communautés à l’étranger reste souvent limité, en comparaison avec le cadre que veut mettre en place l’Algérie.

L’Algérie trace la voie d’une politique culturelle inclusive

En revanche, dans plusieurs pays européens accueillant une importante diaspora amazighe (comme la France, la Belgique ou les Pays-Bas), l’enseignement de Tamazight est souvent pris en charge par des associations communautaires et reste marginalisé dans les systèmes éducatifs officiels. L’engagement de l’État algérien dans la promotion institutionnelle et officielle de cette langue à l’étranger constitue donc une démarche pionnière.

Par cette initiative, l’Algérie affirme clairement qu’elle considère sa diaspora comme une extension active de la nation. Il ne s’agit pas simplement de maintenir un lien affectif ou culturel avec les Algériens de l’étranger, mais bien de leur offrir les outils pour s’inscrire pleinement dans l’héritage linguistique et historique du pays. Ce choix politique place l’Algérie en position de leader en matière de préservation et de diffusion du patrimoine amazigh.

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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