
Les relations franco-algériennes traversent une nouvelle crise diplomatique, marquée par une escalade de mesures restrictives prises par le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Face à ces décisions perçues comme provocatrices et unilatérales, l’Algérie a réagi avec fermeté, dénonçant des violations des conventions diplomatiques internationales et l’absence totale de coordination au sein même du gouvernement français.
L’élément le plus frappant de cette crise réside dans la manière dont les décisions ont été prises. Les démarches entreprises, tant à Alger qu’à Paris, ont permis d’établir que ladite mesure a été prise par le ministère français de l’Intérieur, à l’insu du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, dans l’opacité la plus totale et sans la moindre notification officielle comme le veulent les règles élémentaires de la pratique diplomatique, a révélé le ministère algérien des Affaires étrangères.
Cette absence de coordination entre le ministère de l’Intérieur et le Quai d’Orsay témoigne d’un dysfonctionnement profond au sein de l’exécutif français. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, s’était d’ailleurs déjà démarqué publiquement de son collègue en déclarant sur X qu’il n’y a ni diplomatie des bons sentiments, ni diplomatie du ressentiment. Il y a juste la diplomatie.
Une série de mesures restrictives controversées
Bruno Retailleau a multiplié les initiatives controversées ces dernières semaines :
- Sanctions contre les dignitaires algériens. Plus de 40 membres influents qui auraient récemment « dénigré » la France – figures politiques, économiques ou militaires – se sont vu retirer les facilités diplomatiques qui leur permettaient de séjourner, circuler ou se faire soigner en France. Ce chiffre pourrait même grimper à 80 a prévenu Retailleau.
- Non-reconnaissance des passeports algériens. Le ministre a annoncé son intention de demander aux préfectures de ne plus reconnaître les passeports délivrés par les consulats algériens en France, notamment ceux du consulat de Toulouse. Une décision qualifiée par l’Algérie d’arbitraire, de la discrimination et de l’abus de pouvoir, en ce qu’elle s’inscrit en opposition frontale à la législation française elle-même.
- Entraves aux diplomates algériens. Plus récemment, le ministère des Affaires étrangères a pris connaissance, avec étonnement, de la mesure prise pour entraver l’accès des agents accrédités de l’ambassade d’Algérie en France aux zones réservées des aéroports parisiens aux fins de prise en charge des valises diplomatiques.
La réaction légitime de l’Algérie
Face à ces provocations répétées, la réponse algérienne s’est articulée autour de plusieurs axes :
- Sur le plan diplomatique. L’Algérie a convoqué à plusieurs reprises le chargé d’affaires de l’ambassade de France à Alger pour demander des clarifications. Le ministère algérien des Affaires étrangères a souligné que ces mesures constituent une atteinte grave au bon fonctionnement de la mission diplomatique algérienne en France, ainsi qu’une violation manifeste des dispositions de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.
- Sur le plan juridique. La source algérienne a rappelé que la délivrance de ces passeports est un droit souverain de l’Algérie et une obligation légale, dont la reconnaissance s’impose à la France. L’Algérie a menacé de saisir les Nations unies pour faire valoir ses droits.
Face à cette situation, l’Algérie a décidé d’appliquer, avec rigueur et sans délai, le principe de la réciprocité, notamment concernant les entraves imposées aux diplomates.
Un ministre isolé au sein du gouvernement français
L’analyse de cette crise révèle l’isolement croissant de Bruno Retailleau au sein même du gouvernement français. Le chargé d’affaires auprès de l’ambassade de France à Alger, convoqué aujourd’hui au ministère des Affaires étrangères suite aux entraves rencontrées par le personnel diplomatique algérien dans les aéroports parisiens, a confirmé que le ministre français de l’Intérieur, à l’origine de cette violation des usages diplomatiques, agit seul, sans en référer ni au président Macron ni au ministre des Affaires étrangères.
Cette situation met en lumière les divergences profondes entre l’approche belliqueuse de Retailleau et la ligne plus diplomatique prônée par l’Élysée et le Quai d’Orsay. Le report sine die du rendez-vous prévu entre Emmanuel Macron et Bruno Retailleau témoigne de ces tensions internes.
Les agissements de Bruno Retailleau s’inscrivent dans une stratégie électoraliste visant à séduire l’électorat d’extrême droite. Sa posture anti-algérienne, loin d’être une politique réfléchie, est une manœuvre électoraliste pour séduire une droite dure nostalgique de l’OAS. Il instrumentalise la peur et la xénophobie pour capter un électorat. Ainsi, le ministre multiplie les provocations pour se positionner pour l’élection présidentielle de 2027.