
Un jury américain a condamné BNP Paribas à verser 21 millions de dollars à trois réfugiés soudanais pour complicité d’exactions sous le régime d’Omar el-Béchir. La banque française est accusée d’avoir facilité des transactions ayant financé les milices responsables du génocide du Darfour.
Le géant bancaire français a été condamné par un jury populaire de New York à verser 21 millions de dollars de dommages et intérêts à trois réfugiés soudanais, reconnus victimes des violences commises sous la dictature d’Omar el-Béchir. Une décision symbolique, mais potentiellement explosive : elle pourrait ouvrir la voie à des milliers d’autres plaintes et faire grimper la facture à des montants colossaux. Cette affaire, qui concerne près de 25 000 plaignants, fait peser sur la banque un risque financier et juridique majeur. Selon les experts, si la décision venait à être étendue, BNP Paribas pourrait être contrainte de payer plusieurs milliards de dollars en dédommagements.
Des transactions au cœur du scandale
Les jurés américains ont estimé que BNP Paribas avait facilité des transactions commerciales dont les recettes ont alimenté l’armée et les milices du régime d’el-Béchir, accusées d’exactions et de crimes de guerre au Darfour. La banque, via sa filiale suisse, avait continué à opérer au Soudan entre la fin des années 1990 et 2009, alors même que le pays faisait l’objet de sanctions internationales.
Ce n’est pas la première fois que BNP Paribas est mise en cause pour ses liens financiers avec le Soudan. En 2014, elle avait déjà écopé d’une amende record de 9 milliards de dollars pour avoir contourné l’embargo américain sur le pétrole soudanais.
Une réaction rapide mais prudente de la banque
Face à la tempête médiatique et financière, BNP Paribas a tenu à minimiser la portée du jugement. « Toute tentative d’extrapolation est nécessairement erronée », a indiqué l’institution, soulignant que la décision ne concernait pour l’instant que trois cas individuels. La banque a également annoncé son intention de faire appel, estimant que sa responsabilité n’avait pas été démontrée au cours du procès.
Malgré cette communication maîtrisée, la réaction des marchés ne s’est pas fait attendre. L’action BNP Paribas a chuté de près de 8 % à la Bourse de Paris, lundi 20 octobre, trois jours seulement après le verdict. Une dégringolade qui traduit la crainte des investisseurs face à un risque juridique potentiellement dévastateur.
Des conséquences financières et réputationnelles considérables
Pour les analystes, cette affaire dépasse largement la simple sanction financière. Elle soulève un risque systémique pour la réputation du groupe. « En termes de dédommagement, il risque probablement d’avoir un impact plus important que ce qui a été évoqué jusqu’ici », estime Christophe Nijdam, membre du comité consultatif de l’Autorité bancaire européenne.
Le spécialiste souligne que les provisions actuelles de la banque sont probablement insuffisantes pour faire face à une condamnation d’ampleur. « Le risque juridique aux États-Unis, entre dommages, amendes et dédommagements, est bien plus élevé qu’en Europe », rappelle-t-il.
Au-delà du coût financier, BNP Paribas voit désormais son nom associé au financement du génocide du Darfour, une image désastreuse pour une institution soucieuse de sa réputation internationale et de ses engagements en matière d’éthique et de responsabilité sociale.



