
La Somalie est tristement confirmée comme l’un des lieux les plus dangereux au monde pour grandir. Un rapport alarmant du Secrétaire général des Nations Unies, couvrant la période octobre 2021-septembre 2024, révèle l’ampleur des exactions. Près de 6 800 enfants somaliens ont subi un total choquant de 8 493 violations graves de leurs droits fondamentaux. Au cœur de cette tragédie, le groupe terroriste Al-Shabaab est identifié comme le principal responsable de la terreur, du recrutement forcé d’enfants soldats, et des violences sexuelles, détruisant l’avenir d’une génération entière.
Al-Shabaab, la menace dominante pour l’enfance somalienne
Le groupe islamiste Al-Shabaab , organisation terroriste, affiliée à Al-Qaïda et active depuis 2006, continue de semer la terreur dans de vastes zones rurales du centre et du sud de la Somalie.
Selon le rapport onusien, l’organisation est responsable de la majorité des atteintes documentées contre les mineurs :
- Recrutement Forcé. Al-Shabaab est responsable de 82% des cas de recrutement forcé d’enfants soldats, une pratique qui a touché 2 624 garçons sur les 2 821 enfants recrutés durant la période étudiée.
- Enlèvements Massifs. Car 2 566 mineurs ont été kidnappés. Souvent dans le but de les endoctriner et de les transformer en combattants ou en kamikazes.
- Violences basées sur le genre. En effet, les filles ne sont pas épargnées, subissant des mariages forcés et l’esclavage sexuel au sein du groupe armé.
- Meurtres, mutilations, violences sexuelles : la violence multiforme contre les enfants
Au-delà du recrutement forcé, c’est tout un arsenal de violences qui s’abat sur les plus jeunes. Les chiffres parlent d’eux-mêmes avec 2 143 enfants tués ou mutilés durant ces trois années. Les victimes sont principalement touchées par des tirs de mortier et des engins explosifs improvisés dans des zones de combat ou lors d’attentats aveugles.
Les violences sexuelles touchant les enfants constituent une plaie béante, avec 762 cas recensés. Ce chiffre est très certainement sous-estimé, selon l’ONU. « La crainte de la stigmatisation et l’absence de protection » empêchent de nombreuses victimes de témoigner, note Vanessa Frazier, Représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés.
L’éducation et la santé, pourtant essentielles au développement, sont également prises pour cibles. 145 attaques contre des écoles et hôpitaux privent des milliers d’enfants d’accès aux services de base.
Des avancées fragiles dans un contexte chaotique
Malgré ce sombre tableau, quelques progrès méritent d’être soulignés du côté du gouvernement fédéral somalien. Avec l’appui des Nations Unies, des efforts pour protéger les mineurs se sont intensifiés.
La liste noire de l’ONU a retiré l’armée nationale et la police somaliennes de la liste noire de l’ONU concernant le recrutement d’enfants soldats. Marquant une amélioration dans les pratiques des forces régulières.
De plus, des cadres juridiques cruciaux ont évolué :
- La nouvelle Constitution provisoire, promulguée en mars 2024, établit clairement qu’un enfant est toute personne de moins de 18 ans, une définition juridique essentielle.
- Le 2 décembre 2024, une loi sur la protection des personnes handicapées, incluant les enfants, a également été adoptée.
Un contexte régional complexe et les défis à venir
La crise somalienne s’inscrit dans une dynamique régionale troublée, marquée par l’effondrement étatique, des sécheresses récurrentes et l’ingérence de puissances étrangères.
Si l’adhésion récente de la Somalie à la Communauté d’Afrique de l’Est et l’achèvement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés offrent des perspectives économiques encourageantes, des inquiétudes persistent. La Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) continue de soutenir les forces gouvernementales, mais le retrait progressif prévu des troupes africaines suscite des craintes quant à la capacité du gouvernement à maintenir seul les territoires reconquis face à Al-Shabaab.
Face à l’ampleur de la catastrophe, Vanessa Frazier lance un appel pressant : « Les enfants de Somalie ont besoin de protection, de sécurité et de la possibilité de vivre pleinement leur enfance« .
La communauté internationale est interpellée sur plusieurs points critiques :
- Financement de la réintégration : Les enfants soldats démobilisés nécessitent des programmes complets et des financements substantiels que la communauté internationale peine à fournir.
- Lutte contre l’impunité : Le rapport souligne le manque d’informations sur les poursuites judiciaires contre les auteurs de crimes contre les enfants.
- Abolition de la peine de mort : L’ONU déplore la condamnation à mort de mineurs pour association présumée avec des groupes armés. Une pratique illégale au regard des conventions internationales.
La Somalie illustre tragiquement comment les conflits prolongés détruisent l’avenir d’une nation. Sans action internationale et investissements massifs dans la protection de l’enfance, une génération sera sacrifiée sur l’autel de la violence et de l’extrémisme.



