
À quelques jours de son examen à l’Assemblée nationale, le projet de loi sur la déclaration de patrimoine au Sénégal suscite une vive controverse. Si le texte élargit le cercle des personnalités tenues de déclarer leurs biens, il prévoit une exemption pour le président de la République en fin de mandat.
Un point qui divise profondément majorité et opposition, et relance la question de la transparence dans la vie publique.
Une réforme ambitieuse… mais incomplète selon l’opposition
Le projet de loi qui sera discuté le 18 août constitue un moment important dans la lutte contre l’enrichissement illicite. Désormais, magistrats du parquet, juges d’instruction, autorités locales, auditeurs et dirigeants de sociétés publiques devront faire état de leur patrimoine. Le seuil de déclaration pour les gestionnaires de fonds publics est également abaissé de 1 milliard à 500 millions de francs CFA, afin de mieux encadrer les flux financiers.
Pourtant, cette avancée est jugée insuffisante par une partie de la classe politique. Le Parti démocratique sénégalais (PDS) dénonce le fait que le président sortant ne soit pas soumis à une déclaration en fin de mandat, estimant que c’est “la première condition de la transparence”.
La Constitution au cœur du désaccord
Face aux critiques, le Pastef, principal parti de l’opposition radicale, défend paradoxalement la mesure et argue qu’elle découle de la Constitution actuelle. Celle-ci n’impose au chef de l’État qu’une déclaration de patrimoine au début de son mandat, publiée par le Conseil constitutionnel, et non à son terme.
Amadou Ba, vice-président du groupe parlementaire Pastef, estime que la hiérarchie des normes ne permet pas au législateur de modifier cette règle, fixée par la Constitution. Son évolution nécessiterait d’abord une révision constitutionnelle, que le gouvernement dit vouloir engager prochainement.
Un test pour la crédibilité des lois sur la transparence
L’examen du texte intervient dans un contexte où quatre lois liées à la transparence et à la gouvernance seront soumises aux députés. Si les nouvelles obligations représentent un pas en avant, la polémique autour de l’exemption présidentielle pourrait en atténuer la portée symbolique.
Pour les certains, il s’agit d’un signal négatif envoyé aux citoyens dans la lutte contre la corruption. Pour les partisans du projet, c’est une étape transitoire avant une réforme constitutionnelle plus large. Quoi qu’il en soit, le débat du 18 août promet d’être un révélateur de la volonté politique réelle de renforcer la transparence au Sénégal.