Sénégal : condamnés mais libres, Bachir Fofana et Moustapha Diakhaté dénoncent une justice d’intimidation


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Justice, Tribunal
Tribunal (illustration)

Au Sénégal, deux verdicts judiciaires ravivent les craintes pour la liberté d’expression. Le journaliste Bachir Fofana et l’opposant Moustapha Diakhaté viennent d’être condamnés, l’un pour diffusion de fausses nouvelles, l’autre pour offense au chef de l’État.

Libérés après avoir purgé ou évité la prison, ils dénoncent, avec leurs avocats, des décisions à visée politique qui menacent le droit de critiquer le pouvoir.

Des condamnations aux allures symboliques

D’une part, Bachir Fofana, incarcéré le 27 juin pour avoir critiqué un marché public lié à l’Assemblée nationale, a été condamné à deux mois de prison avec sursis et à une amende de 200 000 francs CFA.

D’autre part, Moustapha Diakhaté, ancien proche du président Macky Sall, écope de deux mois de prison, dont quinze jours fermes qu’il a déjà purgés. Ainsi, tous deux ont retrouvé la liberté le 30 juillet. Cependant, si les peines peuvent sembler légères, elles suscitent une forte contestation. En effet, le parquet avait requis jusqu’à six mois de prison pour chacun d’eux. De plus, leurs avocats dénoncent une stratégie d’intimidation visant à faire taire les voix critiques dans l’espace public.

Une justice sous tension

Par ailleurs, le climat judiciaire sénégalais est déjà marqué par de fortes tensions. Depuis plusieurs semaines, les professionnels de la justice observent une grève prolongée, tandis qu’une vague d’interpellations frappe d’anciens responsables politiques.
En parallèle, un collectif d’avocats a récemment saisi le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire concernant plusieurs figures de l’ancien régime.

Dans ce contexte, les condamnations de Fofana et Diakhaté apparaissent comme des signaux inquiétants. Me El Hadji Diouf, avocat des deux hommes, dénonce des « condamnations destinées à faire taire ».

La liberté d’expression, une ligne rouge franchie ?

En réalité, l’affaire Fofana démontre les limites actuelles du débat public au Sénégal. En révélant des irrégularités présumées dans l’acquisition de véhicules pour les députés, il a touché à un sujet politiquement sensible.
Quant à Moustapha Diakhaté, ses propos jugés offensants à l’égard des dirigeants ont suffi à motiver son incarcération.

Certes, leur libération est saluée par leurs soutiens. Néanmoins, elle ne dissipe pas les inquiétudes. Pour leurs avocats, il ne s’agit pas de jugements fondés en droit mais plutôt de « prises d’otages politiques ». Un recours en appel est déjà annoncé, avec l’espoir d’obtenir une relaxe pure et simple.

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