Retour sur la condamnation du youtubeur marocain Hicham Jerando éxilé au Canada a quinze ans de prison ferme


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Condamnation d'un youtubeur au Maroc

La justice marocaine frappe fort contre l’incitation en ligne à la violence. Le youtubeur Hicham Jerando, depuis son refuge canadien, écope de 15 ans d’emprisonnement pour appels au terrorisme et menaces de mort contre un haut magistrat. Une affaire aux ramifications familiales et diplomatiques complexes.

Rabat, 9 mai 2025. La chambre criminelle, section terrorisme, de la Cour d’appel de Rabat a condamné le youtubeur marocain Hicham Jerando – résidant au Canada – à 15 ans de réclusion criminelle, prononcés par contumace. Le tribunal l’a déclaré coupable de trois chefs d’accusation graves :

  • « Constitution de bande terroriste »
  • « Incitation et persuasion d’autrui à commettre des actes terroristes »
  • « Appels publics au meurtre » visant notamment l’ex-procureur général Najim Bensami

Parmi les preuves déterminantes dans cette condamnation la Cour met en avant des enregistrements vidéo où Jerando appelle explicitement à « tuer Najim Bensami » ainsi que la publication répétée de données personnelles du magistrat et de ses proches et enfin des références aux tactiques de « lone-wolf » (loup solitaire) empruntées aux groupes djihadistes.

Une affaire aux multiples dimensions

L’enquête marocaine avait déjà conduit, début mars, à la mise en examen de plusieurs membres de la famille de Jerando – dont une adolescente de 15 ans – soupçonnés d’avoir facilité la création de comptes et la diffusion des vidéos à partir du Maroc.

Au Canada, une action civile intentée par Najim Bensami est toujours pendante. Jerando a déjà été sommé de retirer plusieurs vidéos jugées diffamatoires par la Cour supérieure du Québec.

Pourtant, les autorités canadiennes n’ont, à ce jour, pas réagi publiquement au jugement marocain.

Les prochaines étapes juridiques

Hicham Jerando
Hicham Jerando

Suite au jugement définitif en première instance prononcé le 9 mai 2025 par la Cour d’appel de Rabat, plusieurs développements juridiques sont attendus. Un pourvoi en cassation pourrait être formé par la défense marocaine, probablement en juin 2025, bien que cette démarche reste peu probable tant que Jerando demeure hors du territoire marocain. Parallèlement, au Canada, une audience cruciale est fixée au 19 septembre 2025 devant la Cour supérieure du Québec à Montréal, concernant les dommages-intérêts civils réclamés par Najim Bensami pour menaces et diffamation.

La question d’une éventuelle demande d’extradition reste entièrement à la discrétion d’Affaires mondiales Canada. Si elle venait à être formulée par les autorités marocaines, cette requête serait soumise au principe de « double incrimination » et à un examen approfondi du respect des droits fondamentaux, conformément aux accords d’entraide judiciaire bilatérale signés en 2015 entre les deux pays.

La condamnation de Hicham Jerando illustre la volonté de la justice marocaine de sanctionner l’incitation en ligne au terrorisme, même lorsque l’auteur se trouve hors du territoire. Cependant, de nombreuses associations de défense des droits de l’homme considèrent que l’interprétation de ce texte, comme d’autres évolution du pays, forment une politique repressive qui se durcit face à toute forme d’opposition ou de contestation du pouvoir.

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