
Au Burkina Faso, une série d’événements récents révèle une inquiétante dérive sécuritaire. À Barini, l’armée a ouvert le feu sur des femmes manifestant contre l’insécurité, faisant deux mortes. À la frontière ivoirienne, des civils ont été tués lors d’une attaque attribuée à des groupes armés. Et à Tougbo, six humanitaires ivoiriens ont été arrêtés par des Volontaires pour la Défense de la Patrie. Trois affaires en quelques jours qui soulignent une militarisation croissante et une perte de confiance entre l’État et ses populations.
Début septembre 2025, les différents incidents sécuritaires au Burkina Faso démontrent la dérive autoritaire que prend le pays. Le 2 septembre, dans le village de Barini, des femmes ont manifesté contre l’incapacité du gouvernement à les protéger contre les incursions terroristes. L’armée burkinabè est intervenue et a ouvert le feu sur les manifestantes. Bilan : 2 femmes tuées et plusieurs blessées. Des vidéos montrent les femmes fuyant les balles et les gaz lacrymogènes. Cette répression questionne les méthodes employées par les forces de sécurité, mais aussi leur pertinence: elles ne semblent pas mieux gérer les protestations pacifiques que les attaques terroristes.
Attaques transfrontalières et représailles meurtrières
La violence ne s’arrête pas à Barini. Quelques jours plus tôt, dans la nuit du 24 au 25 août, dans le village de Difita au nord de la Côte d’Ivoire et à seulement 2 km de la frontière burkinabè, une attaque menée par des hommes armés a tué 4 civils, fait un disparu et grièvement brûlé une femme. Des maisons ont été incendiées et du bétail volé. L’armée ivoirienne est intervenue avec des moyens aériens et terrestres. Les autorités attribuent cette attaque à des groupes djihadistes, mais privilégient l’hypothèse de représailles liées aux Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), des civils armés burkinabè accusés d’exactions contre la population.
Des humanitaires pris pour cibles
Le 24 août, ce sont six agents civils ivoiriens de la Direction d’Aide et d’Assistance aux Réfugiés et Apatrides (DAARA), en mission humanitaire auprès de réfugiés burkinabè, qui ont été arrêtés par les VDP près de Tougbo et transférés par l’armée burkinabè vers une destination inconnue. Il ne s’agissait ni de militaires ni d’espions, mais de travailleurs humanitaires. Cet enlèvement montre les dangers pour les populations ainsi que pour les humanitaires dans cette zone frontalière, déjà mal sécurisée et souvent traversée par des groupes armés.
Ces trois affaires, survenues en l’espace de quelques jours, posent une même question : l’armée burkinabè protège-t-elle encore ses populations ? Ou bien son action nourrit-elle la peur et la méfiance ? En tirant sur des manifestants, en laissant planer des soupçons sur les VDP et en arrêtant des humanitaires, le pouvoir burkinabè montre une dérive sécuritaire inquiétante qui fragilise encore plus la région.