
Après plus de deux mois d’une absence inquiétante, Augustin Matata Ponyo, ancien Premier ministre (2012–2016) et actuel président du parti Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD), sort enfin de sa discrétion.
Porté disparu au lendemain de sa condamnation dans l’affaire Bukanga Lonzo, il y a quelques semaines, Augustin Matata a en réalité pris le chemin de l’exil. C’est le secrétaire général de sa formation politique, Franklin Tshiamala Manyiku qui a donné l’information au cours d’une conférence de presse tenue ce samedi. Selon lui, l’ancien Premier ministre est bien vivant et sous protection, mais forcé à quitter la RDC à la suite de violations de ses droits constitutionnels.
Une condamnation contestée
La Cour constitutionnelle congolaise, dans une affaire liée au projet agro-industriel Bukanga Lonzo, a condamné Matata Ponyo le 20 mai 2025 à 10 ans de travaux forcés, assortis d’une inéligibilité pour cinq ans, ainsi qu’à la confiscation de ses biens au prorata des montants détournés, estimés à plus de 156 millions USD dans le dossier principal et 89 millions USD supplémentaires avec le partenaire sud-africain Christo Grobler. La Cour a aussi ordonné son arrestation immédiate.
Sa défense dénonce un arrêt inconstitutionnel, pointant un revirement jurisprudentiel contraire à une décision antérieure où la Cour s’était déclarée incompétente pour juger un ancien Premier ministre. Ce revirement fait l’objet de critiques par les juristes, qui considèrent que la justice s’est érigée en instrument politique plutôt qu’en gardienne de l’équité judiciaire.
Violations répétées des droits : motifs de l’exil
Selon le secrétaire général de LGD, Franklin Tshiamala Manyiku, Matata Ponyo et sa famille auraient subi quatre années d’acharnement judiciaire, comprenant : des perquisitions musclées, destruction de biens, et une mise en résidence surveillée, des tentatives d’empoisonnement, des entraves à la mobilité, notamment l’impossibilité pour sa fille de se rendre aux États-Unis pour ses études, et pour son épouse de quitter le pays.
Le LGD qualifie sa condamnation de « procès injuste, sensationnaliste et politique », et souligne que l’arrêt de la Cour constitutionnelle constitue un signal politique inquiétant.
Un exil sans destination révélée… encore
Si le parti de Matata Ponyo confirme qu’il est en sécurité, il ne révèle pas encore son lieu de refuge. Il promet toutefois de dévoiler son pays d’exil en temps utile. Il affirme être « contraint, mais pas vaincu », signifiant son engagement à poursuivre son combat en faveur de l’État de droit depuis l’extérieur.
Le LGD appelle à une réunification des forces politiques congolaises, tant celles toujours au pays que celles exilées. Matata Ponyo, selon son parti, entame ainsi une nouvelle phase de résistance politique structurée, utilisant son exil pour nourrir le débat démocratique et faire avancer la cause de la gouvernance et des droits civiques en RDC.