Rapport CNUCED 2025 : la finance pousse l’économie mondiale dans un « gouffre »


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Des dollars
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Le dernier rapport de la CNUCED sonne l’alarme : loin d’être un moteur, la finance mondiale, concentrée et volatile, menace de faire basculer l’économie mondiale dans l’incertitude. L’organisme onusien met en garde contre un ralentissement généralisé de la croissance en 2025, aggravé par des coûts d’emprunt exorbitants qui paralysent les pays en développement.

Une croissance mondiale en décélération constante

L’optimisme quant à une reprise post-pandémique durable est tempéré par les projections sombres de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Pour 2025, l’organisation anticipe un ralentissement de la croissance économique mondiale, qui devrait atteindre seulement 2,6 %, après 2,9 % l’année précédente. Ce chiffre est particulièrement préoccupant, car il se situe bien en dessous des moyennes historiques, que ce soit celle de 3 % observée avant la crise sanitaire, ou celle, plus robuste, de 4,4 % qui prévalait avant la grande crise financière de 2008-2009.

Cette décélération est alimentée par une double incertitude : la volatilité financière et les tensions géopolitiques croissantes. Les pays en développement, moteurs essentiels de la croissance globale, sont particulièrement vulnérables. Ils sont étranglés par des conditions d’emprunt extrêmes, avec des taux d’intérêt pouvant osciller entre 7 et 11 %, contrastant fortement avec les 1 à 4 % pratiqués dans les grandes économies avancées. Ce fardeau financier majeur ampute leur budget et rend presque impossible tout investissement stratégique à long terme.

La finance : de Moteur à maître dangereux du commerce

Le constat le plus tranchant de la CNUCED réside dans la mainmise de la finance sur l’économie réelle et le commerce international. Le rapport souligne une interdépendance dangereuse : plus de 90 % du commerce mondial est désormais conditionné et structuré par le financement, qu’il s’agisse des lignes de crédit, des systèmes de paiement ou des marchés des devises. En conséquence, les moindres soubresauts des marchés financiers exercent une influence sur le commerce qui rivalise avec celle de l’activité économique elle-même.

Cette architecture financière est marquée par une profonde asymétrie. Les pays en développement génèrent plus de 40 % de la production et du commerce de marchandises, mais ne contrôlent qu’environ 25 % de la valeur des marchés financiers mondiaux. Cette concentration du pouvoir dans le Nord global expose le Sud à des chocs externes immédiats. Les sorties rapides de capitaux ou la forte volatilité des devises peuvent se transformer en véritables tempêtes économiques, démontrant la vulnérabilité intrinsèque d’un système où la finance dicte les cycles de l’économie réelle.

Des réformes urgentes pour un système plus équitable

Face à ce diagnostic, la CNUCED appelle à des réformes structurantes pour réaligner le système financier mondial avec les objectifs de développement durable. L’organisme onusien insiste sur la nécessité de s’attaquer à la domination monétaire et à la concentration des flux de capitaux. Une réforme du système monétaire international est jugée indispensable pour endiguer la volatilité des devises et des flux.

Simultanément, il est crucial de renforcer les marchés de capitaux locaux afin de donner aux pays du Sud les moyens de mobiliser leurs propres financements à long terme à des coûts raisonnables. La CNUCED recommande également de mettre à jour les règles commerciales mondiales pour englober les défis contemporains comme le commerce numérique et l’action climatique.

Enfin, une vigilance accrue doit être exercée sur les nouveaux risques émanant de la finance de l’ombre (secteur non bancaire) et de la titrisation. En l’état, conclut le rapport, le système financier est en train de « remodeler » la mondialisation d’une manière qui met en péril les perspectives de développement à long terme des nations les plus vulnérables.

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