Rangers d’Afrique : en première ligne pour la nature, au péril de leur vie


Lecture 4 min.
Gardes du parc de Virunga
Gardes du parc de Virunga

Ils arpentent la savane, les montagnes ou les forêts tropicales, souvent dans l’ombre, pour préserver ce qui reste de la faune sauvage. En Afrique, les rangers sont les sentinelles d’un patrimoine naturel en péril. Leur mission est aussi essentielle que périlleuse, confrontée à des dangers multiples, du braconnage aux bouleversements climatiques. Derrière les uniformes, des femmes et des hommes engagés, comme les « Lionnes » du Kenya, redéfinissent les contours d’un métier longtemps réservé aux hommes. À travers leur courage, c’est toute la question de la coexistence entre l’humain et la nature qui se pose.

Chaque 31 juillet, la Journée mondiale des Rangers rend hommage à celles et ceux qui veillent sur les richesses naturelles et culturelles de notre planète. C’est aussi un moment pour se souvenir de ceux qui ont perdu la vie ou ont été blessés dans l’exercice de leurs fonctions. En Afrique, ces gardiens de la faune sont en première ligne face aux trafiquants d’ivoire, aux braconniers, aux conditions climatiques extrêmes et à la pression grandissante sur les écosystèmes. Leur travail, souvent méconnu, est pourtant vital.

Un métier à haut risque

Être ranger en Afrique, ce n’est pas simplement patrouiller dans la brousse. C’est risquer sa vie chaque jour. Entre les confrontations violentes avec les braconniers lourdement armés, les attaques d’animaux sauvages, les longues heures de marche dans des conditions extrêmes et le stress psychologique constant, les défis sont nombreux. Selon la Fédération internationale des Rangers (IRF), plus de 1 000 rangers ont été tués dans le monde au cours de la dernière décennie, dont une large majorité en Afrique. Et beaucoup d’autres ont été blessés ou souffrent de traumatismes durables.

En dépit de l’importance de leur mission, nombre d’entre eux travaillent sans équipement adéquat, avec un salaire modeste et un accès limité aux soins ou au soutien psychologique. Dans ce contexte difficile, certaines histoires témoignent de courage et d’espoir. C’est le cas de l’Équipe des Lionnes, une unité exclusivement féminine de rangers maasaïs créée en 2019 par le Fonds international pour la protection des animaux (IFAW) au Kenya.

Protéger les quelque 2 000 éléphants de la région

Elles sont aujourd’hui 17 femmes à patrouiller aux côtés de 70 collègues masculins dans la zone communautaire du Olgulului-Olarashi Group Ranch (OOGR), aux abords du célèbre parc national d’Amboseli, à la frontière avec la Tanzanie. Leur mission : protéger les quelque 2 000 éléphants de la région, ainsi que les autres espèces sauvages vivant dans cet écosystème unique reliant Amboseli, Tsavo et le Kilimandjaro.

Une tâche immense, dans un territoire où les conflits entre humains et faune se multiplient en raison de la pression démographique et des changements climatiques. Mais pour ces femmes, les défis ne sont pas seulement physiques. Le plus grand combat se joue parfois au sein même de leur communauté. La société maasaï reste profondément patriarcale, et il était impensable jusqu’à récemment que des femmes puissent devenir rangers.

Les Lionnes : des pionnières en terre Maasaï

Purity Lakara, leader de l’Équipe des Lionnes, incarne cette nouvelle génération de femmes prêtes à bouleverser les traditions pour défendre ce qu’elles aiment : la nature. Son engagement a ouvert la voie à d’autres, inspirant respect et admiration, même chez les plus sceptiques. Autre figure emblématique : Eunice Peneti, la première, et encore aujourd’hui la seule, conductrice d’unité de patrouille dans la zone.

Elle sillonne les pistes poussiéreuses, transporte ses collègues sur des terrains souvent impraticables, et prouve chaque jour que les femmes ont toute leur place sur le terrain. Au-delà de leur rôle de surveillance, les Lionnes jouent également un rôle éducatif important dans les villages alentours. Leur présence contribue à sensibiliser les communautés locales à la protection de la biodiversité et à la cohabitation pacifique entre les humains et les animaux sauvages.

Dernière ligne de défense d’un monde sauvage menacé

Leur approche, souvent plus douce et tournée vers le dialogue, permet d’établir des ponts là où les tensions sont fortes. C’est la preuve que la conservation ne passe pas seulement par la force, mais aussi par l’écoute et la collaboration. La Journée mondiale des Rangers rappelle que la protection de la nature ne se fera pas sans celles et ceux qui risquent leur vie pour elle.

Dans la savane africaine, au cœur des forêts tropicales ou sur les pentes volcaniques, ces femmes et ces hommes sont bien plus que des gardiens. Ils sont la dernière ligne de défense d’un monde sauvage menacé.

Logo Afrik.com
La rédaction d'Afrik, ce sont des articles qui sont parfois fait à plusieurs mains et ne sont donc pas signés par les journalistes
Facebook Instagram
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News