
Le commerce illégal d’espèces sauvages, longtemps relégué au second plan des priorités internationales, s’impose désormais comme une grande menace pour la biodiversité mondiale et la sécurité régionale. Face à cette urgence écologique et criminelle, l’Afrique renforce ses lignes de défense. À travers l’opération SAMA2, des dizaines de pays du continent unissent leurs efforts pour traquer les réseaux organisés qui pillent la faune et la flore. Un signal fort, à l’échelle panafricaine.
Ce mardi 22 juillet, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et les autorités malgaches ont présenté les résultats de l’opération SAMA2, lors d’une conférence de presse tenue à Antananarivo. Cette initiative d’envergure internationale a réuni 35 pays africains, tous engagés dans une lutte active contre le trafic illégal d’espèces sauvages, un fléau aux ramifications internationales.
Des chiffres alarmants, des résultats encourageants
L’opération SAMA2 est une suite renforcée de la première édition, SAMA, menée en 2023. Elle vise à mieux coordonner les efforts régionaux et à renforcer les capacités de détection, d’arrestation et de poursuite contre les réseaux criminels qui exploitent la biodiversité africaine pour des profits illicites. Le bilan de l’opération SAMA2 est aussi éloquent qu’inquiétant. Au total, 67 cas ont été détectés à travers le continent, 92 saisies effectuées, démontrant l’ampleur du trafic.
Madagascar, bien que petite en superficie comparée à d’autres pays africains, se place en troisième position, avec 10 cas détectés et 14 saisies au total. Parmi les saisies les plus marquantes à Madagascar figure la découverte de 800 tortues radiées, une espèce endémique et très menacée. Ces tortues ont été interceptées chez un ressortissant tanzanien, grâce à une alerte émanant d’une source locale. L’intervention rapide des forces de l’ordre malgaches a permis de mettre la main sur ce précieux chargement destiné à l’exportation illégale.
Des interventions remarquables dans plusieurs pays
Si Madagascar est en bonne place dans les résultats de SAMA2, d’autres pays africains ont également mené des opérations spectaculaires. En République Démocratique du Congo, en janvier 2025, les autorités ont saisi 1,5 tonne de défenses d’éléphants dans une camionnette qui s’apprêtait à franchir la frontière. Cette interception prouve que les réseaux opérant dans la région disposent encore de stocks importants, malgré les efforts de conservation.
Au Rwanda, des défenses d’éléphants destinées aux Émirats arabes unis ont été saisies, empêchant un export illicite vers le marché asiatique, toujours très demandeur en ivoire. De leur côté, les autorités nigérianes ont mené un coup de filet en avril 2025, confisquant 14 sacs d’écailles de pangolins et procédant à l’arrestation de 16 personnes. Une procédure judiciaire est désormais en cours contre les présumés trafiquants.
Un engagement renforcé de Madagascar
Pour Max Fontaine, ministre malgache de l’Environnement et du Développement durable, ces chiffres ne sont pas uniquement le reflet d’une hausse du trafic, mais aussi d’un renforcement des capacités de surveillance et de coopération. « Cette augmentation des cas ne veut pas dire que le trafic augmente forcément. Cela montre surtout que les contrôles sont plus efficaces, mieux coordonnés et que l’État s’engage davantage », a-t-il déclaré.
Madagascar fait de la lutte contre le trafic d’espèces une priorité nationale. L’île, riche d’une biodiversité unique au monde, est particulièrement vulnérable aux pressions du marché noir international. Le trafic de tortues, caméléons, bois précieux ou encore de lémuriens alimente des circuits criminels souvent liés à d’autres formes de délinquance transnationale, comme le trafic d’or ou le blanchiment d’argent.
Une coopération multisectorielle et internationale
Max Fontaine a également souligné la nécessité d’une approche intégrée pour lutter contre ces trafics. Cela passe par une coopération étroite entre plusieurs ministères, les douanes, les forces de sécurité, mais aussi la société civile. Ce travail de terrain, réalisé conjointement, permet de renforcer la vigilance et d’améliorer la réactivité face aux menaces.
Sur le plan international, Madagascar ne travaille pas seul. Il collabore activement avec des pays partenaires comme la Thaïlande, les États-Unis ou encore l’Indonésie, ainsi qu’avec des organisations de référence : l’ONUDC, Interpol et l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Ces partenariats permettent un échange d’informations plus fluide, une traçabilité accrue des trafiquants et des opérations coordonnées à travers les frontières.