
Le nord-ouest de l’Afrique s’apprête à vivre sa première vague de chaleur de l’année 2025, et elle s’annonce particulièrement intense. Dès ce lundi 26 mai, un puissant dôme de chaleur saharien va s’installer sur l’ensemble du Maghreb, apportant des températures exceptionnelles pour la saison. Cet épisode caniculaire pourrait perdurer jusqu’au vendredi 30 mai.
L’origine de cette canicule précoce réside dans la formation d’un vaste anticyclone remontant du désert du Sahara. Ce système météorologique verrouille littéralement la circulation atmosphérique au-dessus du Maghreb, créant ce que les spécialistes appellent un « dôme de chaleur ». L’air, en descendant en altitude, se comprime et s’échauffe naturellement, générant des températures particulièrement élevées.
Les prévisions météorologiques dessinent un tableau préoccupant pour l’ensemble de la région. Au Maroc, les zones de Marrakech, Béni Mellal, Rehamna, Youssoufia et les provinces sahariennes connaîtront des températures comprises entre 38 et 42°C, placées sous vigilance orange par la Direction générale de météorologie du mardi au vendredi.
Un phénomène météorologique d’ampleur inédite
L’Algérie ne sera pas épargnée, avec des pics attendus entre 44 et 47°C sur les Hauts Plateaux du centre-ouest, notamment à Relizane, Chlef et Ain Defla, ainsi que dans l’Est du pays autour de M’Sila et Souk Ahras, entre mercredi et jeudi. La Tunisie enregistrera quant à elle des températures dépassant de 10°C les normales saisonnières. Ainsi, elle fera face à des pics autour de 39 à 41°C dès mardi dans le Nord et le Centre intérieur, particulièrement au Kef, à Kairouan et à Sidi Bouzid.
Plusieurs facteurs aggravent cette situation exceptionnelle. La dorsale subtropicale, centrée entre le sud du Maroc et l’ouest de l’Algérie, empêche toute intrusion d’air atlantique plus frais qui pourrait tempérer l’épisode. Parallèlement, un flux de sud transporte du sable saharien jusqu’aux côtes, créant des nuages d’aérosols qui accentuent l’effet de serre local. La Méditerranée présente déjà une température plus chaude que la normaleen surface supérieure de 1°C à la moyenne. Cela contribue à augmenter l’humidité et l’indice de chaleur perçu.
Des conséquences multiples et préoccupantes
Cette vague de chaleur exceptionnelle aura des répercussions dans de nombreux domaines. L’agriculture sera particulièrement touchée, avec un stress hydrique accru sur les cultures d’hiver encore sur pied, qu’il s’agisse des céréales marocaines, du blé dur algérien ou des oliveraies tunisiennes. Les agrumes risquent également de subir des brûlures au niveau des bourgeons, compromettant les récoltes futures.
Sur le plan sanitaire, les autorités appellent à la vigilance face aux risques de coups de chaleur, particulièrement quand l’indice humidex dépasse 40. Les travailleurs extérieurs et les pèlerins en période pré-Hajj font l’objet d’une attention renforcée. Les nuits tropicales, avec des températures minimales supérieures à 25°C, sont anticipées sur le Saïss marocain, le Tell algérien et les plaines tunisiennes, limitant considérablement la récupération physiologique des populations.
L’énergie constitue un autre enjeu majeur, avec des appels nationaux à la modération dans l’utilisation de la climatisation pour éviter les pics de charge en soirée. Le risque d’incendie précoce inquiète également, la végétation déjà sèche dans l’Atlas moyen et la Kabylie créant des conditions particulièrement dangereuses.
Face à cette situation, les autorités rappellent des conseils essentiels : maintenir une hydratation d’au moins deux litres d’eau par jour en évitant les boissons très sucrées ou caféinées, limiter les activités physiques entre 11h et 17h, fermer volets et fenêtres exposées pendant la journée tout en ventilant la nuit, et maintenir une vigilance particulière envers les personnes âgées, les nourrissons et les travailleurs isolés.
L’interdiction des feux ouverts et des brûlages agricoles reste maintenue dans les zones sensibles du Rif, de Kabylie et du Nord-Ouest tunisien.
Un symptôme alarmant du changement climatique
Cette canicule précoce s’inscrit dans une tendance lourde de réchauffement régional. Avril 2025 a été le deuxième mois d’avril le plus chaud jamais mesuré au niveau mondial, et l’Afrique du Nord figure parmi les foyers d’anomalies récurrentes selon les données du service Copernicus sur le changement climatique. L’évolution est particulièrement frappante : alors qu’en 1960, les premières vagues de chaleur se produisaient en moyenne fin juin, elles surviennent aujourd’hui un mois plus tôt selon l’Organisation météorologique mondiale.
Les modèles saisonniers européens et français laissent entrevoir une pause légère le week-end prochain. Cependant, un deuxième épisode de chaleur début juin lié au même système subtropical se prépare. Enfin, en l’absence de précipitations significatives, la question de l’approvisionnement en eau et de la gestion de l’irrigation risque de rester cruciale tout au long de l’été.