Madagascar : le colonel Randrianirina s’apprête à prêter serment, une transition militaire s’installe


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Colonel-Michael-Randrianirina
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Madagascar s’apprête à entrer dans une nouvelle ère politique avec la prestation de serment du colonel Michael Randrianirina, chef du Capsat, comme président de la Transition. Soutenu par la Haute Cour constitutionnelle mais contesté par le camp Rajoelina, il promet de « refonder l’État » dans un pays en crise.

Quelques jours après la destitution du président Andry Rajoelina, Madagascar entre officiellement dans une nouvelle phase politique. Le colonel Michael Randrianirina, chef du Capsat, doit prêter serment comme président de la Transition. Soutenu par la Haute Cour constitutionnelle, mais contesté par le pouvoir sortant, il s’impose désormais comme le nouvel homme fort du pays, dans un contexte de crise institutionnelle et d’incertitude sur la durée réelle de cette transition militaire.

Un militaire propulsé au sommet de l’État

Le colonel Michael Randrianirina, commandant du Corps des personnels et des services administratifs et techniques (Capsat), a pris la tête du Conseil de défense nationale de la Transition. Sa montée en puissance a été rapide : la semaine dernière encore, il rejoignait les manifestants du mouvement Genz qui réclamaient le départ d’Andry Rajoelina. Ce dernier, face à la pression populaire et militaire, a quitté la Grande Île dans la précipitation.

Depuis le palais d’Ambohitsirohotra, le colonel Randrianirina a annoncé, quelques heures après avoir été reconnu par la Haute Cour constitutionnelle, la dissolution de plusieurs institutions clés, dont la Haute Cour elle-même, le Sénat, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et la Haute Cour de justice. Seule l’Assemblée nationale, qui avait voté la veille une motion d’empêchement contre le président sortant, a été maintenue.

“Nous avons pris nos responsabilités”

Dans sa première déclaration officielle, le colonel Randrianirina a justifié sa prise de pouvoir par la “vacance totale” des institutions : « Il n’y a plus de président, plus de président du Sénat, plus de gouvernement. Madagascar est un pays qui se meurt. Nous devons prendre nos responsabilités en tant que citoyens et patriotes », a-t-il déclaré devant la presse.

Soutenu par une partie de l’armée et par certains mouvements civils, il se présente comme un homme de transition, décidé à “remettre le pays sur pied”. Pourtant, la légitimité de son action divise. Tandis que la Haute Cour constitutionnelle l’a reconnu comme chef d’État par intérim, des juristes et observateurs dénoncent une interprétation contestable de la Constitution.

Une transition aux contours flous

Officiellement, selon l’article 53 de la Constitution malgache, une élection présidentielle doit être organisée dans un délai de 30 à 60 jours après la constatation de la vacance du pouvoir. Mais un document circulant depuis mercredi, présenté comme une “charte de la Transition”, suggère une tout autre feuille de route : deux années de transition militaire, renouvelables une fois, assorties d’un référendum constitutionnel et d’élections générales à l’issue du processus.

Cette divergence alimente les doutes sur les véritables intentions du nouveau pouvoir. Certains craignent une consolidation durable du pouvoir militaire, tandis que d’autres y voient une chance de “refondation nationale” après des années de crise politique et économique.

Rajoelina dénonce un “coup d’État”

Dans un communiqué publié depuis un lieu tenu secret, le président Andry Rajoelina a dénoncé une “tentative de coup d’État conduite par une faction rebelle du Capsat”. Il a affirmé être toujours le président légitime de Madagascar et a appelé la communauté internationale à “ne pas reconnaître un régime issu de la force”.

Cette réaction laisse présager une possible confrontation diplomatique et politique entre le pouvoir militaire à Antananarivo et les partisans de l’ancien chef de l’État, encore influent dans certaines régions.

Alors que la population, épuisée par les crises successives, aspire à la stabilité, le colonel Randrianirina hérite d’un pays profondément divisé. La réussite ou l’échec de cette transition dépendra de sa capacité à concilier réforme et légitimité démocratique.

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Fidèle K est journaliste et rédactrice spécialisée, passionné par l'Afrique et ses dynamiques politiques, culturelles et sociales. A travers ses articles pour Afrik, elle met en lumière les enjeux et les réalités du continent avec précision et engagement.
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