Le Ghana à l’heure de l’or noir


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Pétrole
Puit de pétrole

La production pétrolière est censée débuter fin 2010 au Ghana. Le pays le plus stable du golfe de Guinée, il peut, s’il surmonte la malédiction de l’or noir, devenir le centre économique voire politique de l’Afrique de l’ouest.

Après des années de prospections, du pétrole en quantité commercialisable a été officiellement découvert en juin 2007 au Ghana. Le pays espère extraire 125 000 barils par jour et porter cette production à 250.000 bpj d’ici 2013, ce qui le placerait parmi les 50 principaux producteurs mondiaux. Le pétrole va dépasser le secteur minier du Ghana comme source de devises. Si depuis la découverte des gisements pétroliers l’optimisme est de mise, le défi n’est pas sans risque.

Pour ne pas répéter les erreurs qui ont marqué la gestion du pétrole en Afrique, le Ghana multiplie, depuis 2007, les rencontres, conférences et débats sur le sujet. Dès l’annonce de cette découverte, le Ghana a en outre sollicité l’aide avisée de la Norvège, dont le système est réputé pour son équitable répartition des richesses. La question du pétrole alimente les pages de médias et des discussions de comptoirs.

Premières tensions sur fond de querelles politiques

Comme pour toute nouvelle exploitation, l’acquisition des gisements est un enjeu fondamental. Les tractations entre le gouvernement ghanéen et les sociétés d’exploitations se sont ainsi multipliées. Cela fait plus d’un an que la compagnie pétrolière américaine Kosmos Energy, qui a découvert le gisement ‘Jubilé’ en 2007, tente de vendre sa participation. En Octobre, Exxon Mobile a émergé comme acheteur potentiel, mais le Ghana a sitôt fait de s’opposer à l’accord. Ce refus fait suite au conflit qui oppose le gouvernement ghanéen à Kosmos Energy depuis plusieurs mois. Celui-ci l’accuse d’avoir rendu publique des informations géologiques du pays, permettant aux investisseurs potentiels de les consulter sans l’autorisation du gouvernement. La situation politique ghanéenne n’a fait qu’envenimer les choses. En effet, les premiers accords signés avec Kosmos Group, avaient été décidés sous le gouvernement de John Kufour, membre du New Patriotic Party (NPP). Depuis 2009, c’est le National Democratic Congress d’Atta Mills qui est au pouvoir. Celui-ci remet en cause les accords signés entre le NPP et Kosmos, tant par conviction que par logique partisane.

Nombre de détails importants des contrats d’investissement et des plans gouvernementaux signés par l’administration Kufour sont restés inaccessibles pour le citoyen. D’autres décisions cruciales et des engagements ont été pris à huis clos. Le nouveau gouvernement a ainsi abrogé nombre de contrats pour vice de forme ?

C’est maintenant une entité chinoise qui tiendrait la corde. La China National Offshore Oil Corporation (CNOOC), troisième compagnie pétrolière chinoise et la Ghana National Petroleum Corp (GNPC) se sont liées pour soumettre une offre de cinq milliards de dollars (3,6 milliards d’euros) sur les actifs ghanéens de Kosmos Energy, y compris sa participation de 23,49% dans le gisement Jubilee.

Des doutes quant à la solidité du Ghana ont peu a peu émergé. Si le Ghana fait figure de modèle de stabilité en Afrique, il est tout de même resté vulnérable aux chocs extérieurs, et très dépendant des recettes d’exportation de l’or et du cacao. La communauté internationale redoute qu’il ne puisse supporter le poids de sa dette et que ses revenus pétroliers soient gaspillés. Le pays espère ramener le déficit public sous la barre des huit pour cent du PIB d’ici la fin de l’année. Mais certains analystes soulignent que des arriérés de dettes et l’impact d’une révision de l’échelle des salaires dans le secteur public pourraient alourdir la facture. Le Fonds monétaire international a mis en garde ce mois-ci contre le risque d’accumulation au Ghana d’une dette publique démesurée. L’agence de notation Standard and Poors a estimé en août que les objectifs budgétaires à moyen terme n’étaient pas réalistes. Elle a ramené la note souveraine du Ghana de « B+ » à « B ».

Cependant plusieurs facteurs permettent de demeurer optimiste. Un certain nombre de conditions offrent au Ghana la possibilité de garantir transparence et responsabilité. Les Ghanéens sont non seulement fiers d’être loués pour leur remarquable et paisible socle démocratique, mais ils prennent cela très au sérieux. Mettre l’exploitation pétrolière correctement sur les rails renforcerait, à n’en pas douter, la reconnaissance internationale et l’orgueil national. Le Ghana a aussi une haute idée de l’identité nationale en comparaison avec ses voisins. La stabilité politique, l’environnement paisible, l’espace démocratique qui favorise la liberté de la presse et une société civile active sont autant d’éléments qui peuvent aider le Ghana à atteindre cet objectif.

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