Le Bayern Munich met fin à son contrat « Visit Rwanda » pour protester contre le conflit en RDC. Quid du PSG et Arsenal ?


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Bayern Visit Rwanda
Bayern Visit Rwanda

Le Bayern Munich a annoncé la fin de son partenariat avec la campagne de promotion touristique « Visit Rwanda », transformant son accord commercial en un programme axé uniquement sur le développement de jeunes footballeurs. Cette décision est liée à la volonté du club allemand de ne pas se lier au régime de Kagame en raison du conflit dans l’Est de la RDC.

Depuis 2018, le Rwanda a déployé une stratégie ambitieuse de « soft power » à travers le football européen. En mai 2018, le gouvernement avait conclu un contrat de 34 millions d’euros avec le club anglais Arsenal, marquant le début d’une expansion remarquable dans le sponsoring sportif continental.

Aujourd’hui, « Visit Rwanda » est devenu l’un des sponsors les plus visibles du football européen. La marque sponsorise actuellement plusieurs clubs des ligues européennes les plus importantes telles que Bayern Munich, Paris Saint-Germain et Arsenal. Plus récemment, en avril 2025, Visit Rwanda est devenu sponsor officiel de l’Atlético de Madrid jusqu’en juin 2028, marquant sa première entrée dans la Liga espagnole.

Cette stratégie semble porter ses fruits économiquement. Selon les cabinets internationaux Nielsen, Blinkfire Analytics et l’agence de recherche Hall and Partners, les partenariats conclus avec Arsenal et le PSG ont permis d’attirer un million de visiteurs, générant 445 millions de dollars (412 millions d’euros) de recettes.

Le conflit en RDC, catalyseur d’une prise de conscience

La rupture avec le Bayern trouve ses racines dans le conflit dans l’est de la République démocratique du Congo. Le Rwanda est accusé de soutenir le groupe rebelle M23 dans l’est de la RDC riche en minéraux, juste de l’autre côté de la frontière avec le Rwanda qui ensuite peut gérer les exportations.

En février 2025, la ministre des Affaires étrangères de la RDC, Thérèse Kayikwamba Wagner, a écrit aux trois clubs questionnant la moralité de leurs accords de sponsoring, déclarant : « Des milliers de personnes sont actuellement piégées dans la ville de Goma avec un accès restreint à la nourriture, à l’eau et à la sécurité« .

La pression s’est intensifiée avec la prise de Goma par le M23. Selon le ministère de la Santé de la RDC, il y a près de 800 corps dans les morgues des hôpitaux autour de Goma suite à l’offensive des rebelles du M23 dans cette région qui abrite des mines lucratives d’or, de coltan et d’étain.

Une décision sous pression des supporters

En février, les supporters du Bayern ont déployé une grande banderole lors d’un match pour protester contre l’accord, qui se lisait : « Visit Rwanda – quiconque regarde avec indifférence trahit les valeurs du FC Bayern ! »

Jan-Christian Dreesen, président du directoire du club, a déclaré : « Ce conflit suscite des réactions dans le monde entier. Nous les prenons très au sérieux« . Le club a choisi de transformer son partenariat commercial en un programme de développement des talents, préservant ainsi son académie de formation à Kigali tout en prenant ses distances avec la promotion touristique du régime de Paul Kagame.

Paradoxalement, alors que le Bayern fait marche arrière, d’autres clubs maintiennent ou renforcent leurs liens avec le Rwanda. Le PSG a renouvelé son partenariat avec Visit Rwanda jusqu’en 2028, démontrant que tous les clubs européens n’adoptent pas la même approche éthique face aux controverses géopolitiques.

Gunners for Peace
Gunners for Peace

Malgré les protestations continues des supporters d’Arsenal avec le groupe « Gunners for Peace » qui distribue des brassards pour couvrir le logo Visit Rwanda sur les maillots, le club londonien maintient son accord.

Entre sportswashing et développement économique

Cette affaire illustre le dilemme croissant du football moderne : comment concilier les impératifs financiers avec les responsabilités éthiques ? Alors que certains critiques accusent le Rwanda de « sportswashing » – utiliser des sponsorings sportifs pour améliorer son image internationale au milieu d’accusations de violations des droits de l’homme – le gouvernement maintient que ces investissements sont une partie critique du développement du pays. Le tourisme est l’un des secteurs leaders du Rwanda, contribuant environ 10% à son PIB avant la pandémie de COVID-19.

Cette rupture du contrat, saluée par les associations congolaises et plusieurs ONG internationales, apparaît comme une victoire symbolique : celle du football éthique face aux logiques purement financières.

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Amadou Atar est une référence dans le monde du football africain. Il est précis et objectif dans ses articles, même si on ne peut lui enlever un penchant historique pour le mythique club français de Saint-Etienne où sont passés plusieurs des plus grands joueurs africains de l'histoire
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