L’Etat malien aux mains des militaires


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Drapeau du Mali
Drapeau du Mali

Bamako, capitale malienne vit une situation de crise depuis mercredi après-midi. Un coup d’Etat militaire est confirmé par les mutins qui tiennent la ville où un couvre-feu a été déclaré. Retour sur la chronologie des évènements et reportage de notre correspondant.

« Le CNRDR (Comité national de redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat) a décidé de prendre ses responsabilités en mettant fin au régime incompétent et désavoué de monsieur Amadou Toumani Touré. La constitution est suspendue jusqu’à nouvel ordre, toutes les institutions de l’Etat sont dissoutes jusqu’à nouvel ordre. Un gouvernement inclusif d’union nationale sera constitué après consultation de toutes les forces vives de la nation. L’objectif du CNRDR ne vise en aucun cas une confiscation du pouvoir et nous prenons l’engagement solennel de restaurer le pouvoir à un président démocratiquement élu dès que l’unité nationale et l’intégrité territoriale seront rétablies », telles sont les grandes lignes de la déclaration lue sur l’ORTM par le Lieutenant Amadou Konaré, porte-parole du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat.

La ville de Bamako est pendant ce temps en proie à des pillages. De nombreux citoyens se voient dépouillé de leurs biens. « Restez tous à la maison. Je suis sorti et les militaires m’ont pris ma voiture et mes biens », explique un habitant. Pour mettre fin à ces actes de vandalisme, un deuxième communiqué est lu un peu plus tard à la télévision par le capitaine Amadou Haya Sanogo, président du CNRDR dont voici un extrait« Nous demandons à la population malienne de rester sereine et de garder son calme. Nous prenons toutes les dispositions nécessaires et utiles pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Un couvre-feu est décrété à partir de ce jour 22 mars à partir de 06h GMT et cela jusqu’à nouvel ordre ».

Tout est parti de Kati

Tout a commencé mercredi aux environs de 9h du matin, à Kati, la ville-garnison où se trouve la poudrière de l’armée malienne. Des manifestants posent des barricades sur les routes et montrent leur volonté de marcher sur Koulouba, la colline du savoir où est dressé majestueusement le palais présidentiel. Les forces de l’ordre empêchent les marcheurs de « monter ». Les militaires commencent à tirer des balles en l’air, c’est la panique totale en ville, « je crois que les militaires vont faire un coup d’Etat au Président ATT » nous déclarait un citoyen malien. A Kati, les rues sont bloquées et aucun mouvement des habitants vers un autre lieu n’est possible.

Il est 15h GMT mercredi, l’entrée de l’Office de la radiodiffusion télévision du Mali (ORTM) est envahie par des militaires. Une vingtaine d’hommes se chargent de vider le lieu de ses travailleurs : techniciens, journalistes, chauffeurs, etc. La chaîne nationale cesse donc d’émettre. « Ils nous ont demandé de rentrer à la maison. Dès que j’ai constaté la prise de la radio nationale par les militaires, j’ai pensé à un coup d’Etat », nous affirme un journaliste de l’ORTM que nous avons joint au téléphone. Un technicien de l’ORTM a trouvé refuge chez un ami à Badalabougou, quartier situé sur la rive droite de Bamako non loin de son lieu de travail. « J’habite à Kati. Je ne pourrai plus monter là-bas aujourd’hui. Je vais passer la nuit chez mon ami. J’ai demandé à ma famille de rester sur place et de m’attendre ». La préoccupation est grande chez les populations, chacun cherche des informations : « Mon frère est dans l’armée, il vient de m’informer qu’un communiqué sera bientôt passé à la télévision », explique Monsieur Samassékou. Ces mutins revendiquent entre autres, le renforcement des moyens militaires de leurs collègues qui combattent au nord contre le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad), un groupe de jeunes touaregs armés qui demandent l’« indépendance » d’une partie du Nord du Mali. De violents combats ont déjà eu lieu depuis mi-janvier. Plusieurs dizaines de morts sont déplorées du côté de l’armée régulière du Mali. (Lire l’article Le nord-Mali serait aux mains du mouvement armé Ançar Dine)

Quelques heures plus tard, la chaîne de télévision Africable dont le siège se trouve sur la rive droite de Bamako, est saccagée par des militaires. Le signal est coupé depuis lors.

Jusqu’à minuit – 1h du matin, des tirs sont entendus dans plusieurs quartiers de la ville de Bamako. Des échanges de tirs sont également signalés à l’entrée du pont des martyrs qui relie la rive droite à la rive gauche de Bamako.

Le Président Amadou Toumani Touré aurait quitté le palais présidentiel, selon des sources militaires. Les mutins n’ont cependant donné aucune information à son sujet. Plusieurs ministres ont été arrêtés, notamment le ministre des Affaires étrangères dont la maison a été vandalisée. Deux candidats à l’élection présidentielle Modibo Sidibé, ancien Premier ministre et Jeamille Bittar, président de la chambre des commerces du Mali, ont aussi été arrêtés.

Par Djèmani

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