
La 4e Conférence internationale sur le financement du développement qui se déroule à Séville du 30 juin au 3 juillet 2025 a été marquée par la forte implication de la diplomatie algérienne. Représentée par le Premier ministre Nadir Larbaoui au nom du président Abdelmadjid Tebboune, l’Algérie y défend notamment une vision ambitieuse de réforme du système financier international.
Dans son allocution prononcée mardi par le Premier ministre Larbaoui à Séville, le président Tebboune a livré un diagnostic sans complaisance de l’architecture financière mondiale. « L’actuel système financier mondial n’est plus adapté aux mutations majeures que connaît le monde aujourd’hui », a-t-il déclaré, pointant du doigt les dysfonctionnements qui pénalisent les pays en développement.
Le chef de l’État algérien a identifié plusieurs facteurs aggravant les déséquilibres mondiaux : « le fossé de développement qui se creuse entre les pays », « le fardeau de la dette qui s’alourdit », « l’impact des retombées du changement climatique sur les économies de plusieurs pays » et « l’aggravation des conflits et des guerres, y compris ce qui se passe au Moyen-Orient, particulièrement en Palestine occupée et à Ghaza meurtrie, en proie à un génocide contre le peuple palestinien ».
L’Algérie, porte-voix du Sud global
Cette conférence de Séville intervient dans un contexte international particulièrement tendu. Organisée sous l’égide des Nations Unies, cette rencontre vise à repenser en profondeur l’architecture financière mondiale pour mieux répondre aux besoins des pays en développement et accélérer la réalisation des Objectifs de développement durable. Le déficit de financement est estimé à plus de 4 000 milliards de dollars par an pour atteindre les objectifs d’ici 2030.
L’Algérie, sous la présidence de Tebboune, s’est positionnée comme l’un des porte-voix les plus influents du Sud global. Le président algérien a défendu une « vision équitable du développement », en dénonçant les « inégalités structurelles » du système actuel, qui pénalise les pays en développement via des « conditions de prêt désavantageuses » et des « agences de notation biaisées ».
Au-delà du diagnostic, l’Algérie a présenté des propositions concrètes. Tebboune a insisté sur la nécessité de « réformer l’architecture financière mondiale pour que les pays en développement puissent participer à la gouvernance des institutions financières mondiales ». Le président algérien a également soutenu « la création d’un cadre de travail onusien visant à remédier aux failles dans la structure de la dette », ainsi que la mise en place de « méthodes de notation plus transparentes et plus équitables », saluant notamment « la création d’une agence de notation financière africaine indépendante ».
L’engagement financier algérien en Afrique
Pour donner du poids à ses propositions, l’Algérie a mis en avant son engagement concret en faveur du développement africain. Le président a rappelé que l’Algérie a toujours fait du développement durable et de la solidarité des priorités dans sa politique étrangère, citant sa contribution au financement de projets africains via l’Agence algérienne de coopération internationale pour la solidarité et le développement. À ce titre, « pas moins d’un milliard de dollars » ont été consacrés à des projets dans les domaines de l’infrastructure, de la santé, de l’éducation et de l’énergie.
Cette conférence de Séville se déroule dans un contexte géopolitique particulièrement complexe. L’absence remarquée des États-Unis, qui se sont retirés des négociations sous l’administration Trump, affaiblit la portée des discussions. Le multilatéralisme traverse une crise profonde, marquée par les réductions d’aide publique au développement de plusieurs pays riches.
Un compromis de Séville non engageant
Le « compromis de Séville » qui doit être formellement adopté par les États ne propose pas de nouvelle feuille de route. Cependant, il renforce les engagements du programme d’action d’Addis-Abeba. Ce texte met un accent particulier sur l’élargissement de l’espace budgétaire, l’augmentation des recettes fiscales, la soutenabilité de la dette publique ainsi que sur une coopération internationale renforcée. Cependant, les analystes restent sceptiques quant à la portée réelle de ces engagements. L’Engagement de Séville reste « non contraignant », sans mécanismes concrets pour obliger les pays riches à respecter leurs engagements.
La participation de l’Algérie à cette conférence s’inscrit dans une stratégie diplomatique plus large. Le roi d’Espagne, Felipe VI, a chargé le Premier ministre Larbaoui de transmettre ses salutations et de dire toute son estime au président Tebboune, témoignant du respect international dont jouit la diplomatie algérienne.
Par ailleurs, en marge de la conférence, le Premier ministre algérien a eu des entretiens bilatéraux avec le Premier ministre palestinien Mohammad Mustafa, réaffirmant l’engagement constant de l’Algérie en faveur de la cause palestinienne.
Alors que les discussions se poursuivent jusqu’au 3 juillet, l’Algérie apparaît comme l’un des acteurs les plus influents de cette conférence. En effet, elle porte les aspirations d’un Sud global en quête de justice économique et de souveraineté financière.