Guinée-Bissau : un double scrutin historique dans un climat politique tendu


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Le Président bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embalo

Les Bissau-Guinéens votent ce dimanche 23 novembre 2025 pour élire à la fois leur président et leurs députés, dans un climat chargé de tension et d’incertitude. Plus de 966 000 électeurs sont appelés à se rendre aux urnes pour un double scrutin décisif, susceptible de définir l’avenir démocratique de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest. Douze candidats briguent la magistrature suprême, tandis que les 102 sièges de l’Assemblée nationale populaire, dissoute en décembre 2023 après une présumée tentative de coup d’État, doivent être renouvelés.

Les bureaux de vote ont ouvert à 7 heures et fermées à 17 heures locales en Guinée Bissau. Les premiers résultats provisoires sont attendus au plus tard le 27 novembre. Plus de 6 700 membres des forces de sécurité, appuyés par la mission de stabilisation de la CEDEAO, ont été déployés sur le territoire afin de prévenir tout incident. L’espace aérien ainsi que les frontières terrestres et maritimes restent fermés durant toute la journée du vote.

Embaló en quête d’un second mandat

Le président sortant, Umaro Sissoco Embaló, 53 ans, sollicite un second mandat à la tête du pays. En cas de victoire, il deviendrait le premier chef d’État bissau-guinéen à être réélu depuis l’instauration du multipartisme en 1994. Il affronte notamment l’ancien président José Mário Vaz, désireux de revenir au pouvoir, et Fernando Dias da Costa, un nouveau venu soutenu par une coalition d’opposition.

Ce scrutin se déroule sans le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), formation historique fondatrice de la nation. Sa coalition, la Plateforme de l’alliance inclusive–Terra Ranka, dirigée par Domingos Simões Pereira, a été invalidée par la Cour suprême. Cette exclusion du principal parti d’opposition marque une rupture majeure dans la vie politique nationale.

Des attentes fortes dans un pays en difficulté

Dans l’un des pays les plus pauvres au monde, où près de 40% de la population vit sous le seuil de pauvreté, la demande de changement est pressante. Classée 174e sur 193 au dernier indice de développement humain, la Guinée-Bissau a une espérance de vie moyenne limitée à 64 ans. Nombre d’électeurs expriment le souhait de voir enfin émerger stabilité et développement, à travers des investissements dans les infrastructures et les services publics.

Alamar Bidinthilé, chauffeur de 40 ans rencontré dans un bureau de vote, attend du prochain président « du changement en construisant des infrastructures et de la stabilité« . Un sentiment partagé par Mayo Sa, 53 ans : « Je vote depuis que je suis jeune mais depuis il n’y a pas de changement dans le pays. Cette fois-ci, j’espère que ce sera la bonne. »

Ces élections interviennent après plusieurs reports. Prévu initialement pour décembre 2024, le scrutin avait été repoussé par le président sortant pour des raisons de sécurité. Ce décalage a nourri les accusations d’un pouvoir cherchant à prolonger son mandat. Depuis son indépendance en 1973, la Guinée-Bissau a connu quatre coups d’État réussis et plus d’une douzaine de tentatives, totalisant plus de deux décennies de régime militaire.

Un test pour la crédibilité démocratique

Quelque 200 observateurs internationaux surveillent le déroulement du vote, estimé jusqu’ici calme et transparent. Mais les observateurs locaux rappellent que les tensions ressurgissent souvent après la proclamation des résultats, sur fond de contestations et d’accusations d’irrégularités, comme en 2019.

Masque Africamaat
Spécialiste de l'actualité d'Afrique Centrale, mais pas uniquement ! Et ne dédaigne pas travailler sur la culture et l'histoire de temps en temps.
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