Est de la RDC : un pas décisif vers la paix avec la signature d’une déclaration de principes entre Kinshasa et l’AFC/M23 à Doha


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Signature, ce 19 juillet 2025 d'une déclaration de principes entre la RDC et l'AFC_M23 à Doha
Signature, ce 19 juillet 2025 d'une déclaration de principes entre la RDC et l'AFC_M23 à Doha

Après plus de trois mois de discussions directes dans la capitale qatarienne, le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et le mouvement rebelle Alliance Fleuve Congo/M23 (AFC/M23) ont signé, ce samedi, une déclaration de principes en vue d’un accord de cessez-le-feu permanent, marquant une avancée significative dans le processus de paix pour l’est du pays.

La cérémonie de signature, présidée par le ministre d’État qatari aux Affaires étrangères, s’est tenue en présence de représentants de la communauté internationale, dont des émissaires des États-Unis, de l’Union africaine (UA) et des Nations unies. Ce texte fait suite à l’accord de paix signé le 27 juin dernier entre la RDC et le Rwanda à Washington. Il constitue une nouvelle étape majeure dans les efforts régionaux et internationaux pour mettre fin au conflit qui ensanglante les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.

Un engagement mutuel vers une solution pacifique

Selon le contenu de la déclaration, les deux parties réaffirment leur volonté de résoudre le conflit par la diplomatie et le dialogue, dans le respect des principes de la Constitution congolaise, de la Charte de l’UA, de celle des Nations unies et du droit international humanitaire.

Le texte prévoit :

  • un cessez-le-feu permanent, interdisant toute attaque aérienne, terrestre, fluviale ou lacustre, ainsi que la propagande haineuse et la prise de positions militaires par la force ;
  • un mécanisme conjoint de supervision et de vérification, avec la participation de la MONUSCO et des dispositifs régionaux, pour garantir le respect des engagements ;
  • des mesures de confiance, telles que la libération de prisonniers identifiés par les deux camps, en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ;
  • la restauration de l’autorité de l’État dans les zones actuellement sous contrôle de la rébellion, dans le cadre d’un futur accord de paix qui en précisera les modalités ;
  • le retour volontaire et sécurisé des réfugiés et déplacés internes, en coordination avec le HCR et les pays d’accueil.

Vers un accord de paix global d’ici août

Les dispositions de cette déclaration entrent en vigueur immédiatement et devront être appliquées d’ici au 29 juillet 2025. Les négociations directes pour un accord de paix global sont prévues pour commencer au plus tard le 8 août, avec pour objectif la signature d’un accord final d’ici le 18 août 2025. Ce futur accord devra s’articuler avec celui signé à Washington entre Kinshasa et Kigali. Le gouvernement congolais était représenté à Doha par Sumbu Sita Mambu, représentant spécial du Président Félix Tshisekedi pour les processus de Luanda et de Nairobi, tandis que l’AFC/M23 était représentée par Benjamin Mbonimpa, son secrétaire permanent.

La Commission de l’Union africaine, par la voix de son président, Mahamoud Ali Youssouf, a salué une « étape majeure dans les efforts pour instaurer une paix durable dans la région des Grands Lacs ». De son côté, le Qatar a réaffirmé sa volonté de poursuivre ses efforts de médiation jusqu’à la conclusion d’un accord de paix effectif. Sur le terrain, la situation reste néanmoins fragile. Depuis janvier 2025, l’AFC/M23 s’est emparée de vastes zones stratégiques riches en minerais, exacerbant les tensions dans les Kivu. Malgré la pression militaire des FARDC, les affrontements et les déplacements de population se sont intensifiés.

Une course contre la montre

La déclaration de Doha met également l’accent sur la protection des civils, la fin des hostilités et la réinsertion des ex-combattants. Elle constitue un signal fort en faveur de la résolution pacifique du conflit et du retour progressif de la confiance entre les parties. L’issue des futures négociations déterminera si cette initiative pourra réellement amorcer la fin d’un cycle de violence vieux de plus de deux décennies dans l’est congolais, marqué par les ingérences régionales, les pillages de ressources naturelles et la tragédie humanitaire vécue par des millions de civils.

Avec un calendrier resserré pour la signature d’un accord de paix global, les prochains jours seront cruciaux. Les observateurs soulignent l’importance de maintenir l’élan diplomatique, d’impliquer toutes les parties prenantes – y compris les communautés locales – et de garantir une mise en œuvre concrète des engagements pris. Pour l’heure, la signature de la déclaration de principes à Doha représente un sursaut diplomatique majeur, mais la véritable paix dans l’est de la RDC dépendra de la capacité des acteurs à transformer ces engagements en actions durables et vérifiables sur le terrain.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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