Ecran noir pour CFI TV


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Canal France International a décidé de mettre définitivement fin à la diffusion de CFI TV le 31 décembre 2003. La société publique souhaite recentrer son activité sur sa mission initiale de coopération. La France entend rationaliser sa politique audiovisuelle extérieure. La disparition de la chaîne ne suscite aucune polémique particulière parmi les professionnels africains.

Fin de l’aventure pour CFI TV. La chaîne publique française cessera définitivement d’émettre mercredi. Canal France international a décidé de se recentrer sur son rôle initial de coopération audiovisuelle notamment pour soutenir la production africaine. L’arrêt de CFI TV ne fait pas grand bruit parmi les confrères africains qui la considéraient comme un simple outsider.

« La décision de mettre fin à la diffusion de CFI TV a été une décision mûrement réfléchie et concertée entre ses actionnaires (France Télévision, 75% et Arte 25%, ndlr) et le ministère des Affaires étrangères », explique Serge Adda, le président de TV5 et de CFI. «Il fallait rationaliser la politique audiovisuelle extérieure de la France. Aussi avons-nous repositionné CFI sur ses missions premières, à savoir la coopération et l’assistance technique. »

TV5 vs CFI TV

« CFI TV et TV5 étaient il y a cinq ou six ans les deux seules chaînes françaises diffusées en Afrique. Mais l’arrivée des bouquets satellite a profondément modifié le paysage de l’audiovisuel africain en permettant l’arrivée de nombreuses autres chaînes françaises sur le continent. Il fallait clarifier le rôle de TV5 et de CFI qui avaient la même activité de diffusion. Canal France international est désormais dévolu à 100% à la coopération et TV5 100% à la diffusion », précise Etienne Fiatte, sous-directeur de la télévision et de la radio au sein de la Direction de l’audiovisuel extérieur et des techniques de communication (ministère des Affaires étrangères).

Après la cession du bouquet Le Sat au groupe Canal +, via sa filiale Media Overseas, il ne reste plus à Canal France international que sa banque de programmes CFI pro, chargée de fournir du contenu aux différentes chaînes, notamment africaines. Serge Adda dément les allégations qui avancent que CFI TV aurait été sacrifiée pour pouvoir financer la future chaîne info internationale française. « Il faut remettre les choses à leur place. CFI TV est une petite structure. Il y a moins de dix personnes qui y travaillent. Ce n’est absolument pas une chaîne budgétivore. Ce ne sont pas les mêmes ordres de grandeur que la future chaîne info dont le coût est estimé à 70 millions d’euros. L’arrêt de CFI TV permettra certes de faire des économies mais ne pourra jamais financer un projet de cette ampleur. »

Les télévisions africaines indifférentes

Le président de TV5 et de CFI estime que la fin de CFI TV permettra également de réduire la concurrence avec les chaînes nationales africaines qui diffusent, en partie, les même programmes puisque toutes s’abreuvent à la même source : celle de CFI pro. Les principaux intéressés ne sont pas du même avis. « La disparition de CFI TV n’a aucun impact sur notre activité parce que nous sommes une chaîne privée », explique Christian Lagnidé, le président d’LC2 au Bénin. « Cela concerne uniquement les chaînes nationales qui reprenaient la même chose que CFI TV dans CFI pro ».

« C’est la fin d’un concurrent, mais CFI TV était le maillon faible des chaînes francophones », analyse Ibrahim Chérif, rédacteur en chef du journal week-end à la chaîne nationale Cameroun radio télévision (CRTV). « CFI TV avait les même problèmes de moyens que nous. Elle diffusait par exemple les informations en léger différé par rapport à TF1 ou France 2 et France 3. Donc pour ceux qui ont le satellite, elle n’était pas vraiment concurrentielle. Elle n’était pas notre adversaire le plus redoutable. »

Soutenir la production africaine

Pour d’autres, avec le maintien et le renforcement de CFI pro, la disparition de CFI TV est un « non-événement », estime un professionnel de l’audiovisuel en d’Afrique de l’ouest qui a souhaiter garder l’anonymat. « CFI TV entre uniquement en concurrence avec les chaînes nationales qui n’ont pas les moyens de faire de la production locale et qui sont obligées de compléter leurs grilles avec des programmes de CFI pro ou des productions de CFI TV. » Aucun regret, plutôt de l’amertume, pour notre contact qui déplore le fait que « l’argent des productions de CFI TV n’ait pas plutôt été utilisé pour soutenir la production locale afin que les chaînes puissent avoir des produits moins standardisés ». Si certains programmes comiques burkinabés font l’unanimité dans la sous-région, il n’en est pas de même pour les campagnes anti-sida tournées en Afrique du Sud et produites par CFI TV où les Ouest-Africains ne se reconnaissent pas.

Un travers auquel le ministère des Affaires étrangères compte remédier. « Nous avons créé un fonds de soutien à la production, le Fonds image d’Afrique, pour aider les producteurs africains du continent à réaliser leurs projets », rappelle Etienne Fiatte. Et plutôt que de parler de concurrence, il préfère insister sur le rôle fondamental de coopération que jouera désormais CFI. « CFI a mis en place un programme de coopération de trois ans avec les télévisions africaines pour leur apporter une assistance en terme de conseils et développer les programmes africains à l’antenne. »

TV5, seule chaîne africaine

« TV5 Afrique va reprendre une partie des programmes de CFI TV (comme le Club de la presse, ndlr). La chaîne devient le navire amiral de notre présence en Afrique », annonce Serge Adda. « Et nous avons, plus que jamais, des projets de développement avec CFI en matière de coopération sur les grands événements culturels et sportifs du continent. » Epiloguant sur la fin de CFI TV, il répond à ceux qui craignent que la disparition de CFI TV n’enlève un espace d’expression aux artistes et productions africaines, que « ce n’est pas la chaîne qui fait la coopération mais le système de coopération qui transporte et donne écho aux événements africains sur l’ensemble du continent ».

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