
À Diafarabé, au cœur de la région de Mopti au Mali, le marché à bétail du 12 mai dernier a été le théâtre d’une opération brutale. Ce jour-là, des militaires maliens ont procédé à l’arrestation de 27 hommes, tous civils selon les témoignages. Depuis cette rafle, les familles sont restées sans nouvelles de leurs proches, jusqu’à la terrible découverte de fosses communes contenant une vingtaine de corps mutilés.
Une scène macabre, indicible, qui a semé la panique dans le village.
Des civils exécutés sans jugement
Jeudi 15 mai, après trois jours de silence de l’armée, les familles ont été autorisées à se rendre sur les lieux où les hommes arrêtés auraient été conduits. Mais à une condition : ne pas emporter de téléphone portable. Sur place, elles découvrent avec effroi des corps décomposés, égorgés, jetés dans trois fosses communes. Des civils, arrêtés sans combat ni procédure judiciaire. Pour de nombreux habitants, ces exécutions sommaires relèvent d’un crime ciblé contre la communauté peule, majoritaire à Diafarabé.
Une armée accusée, une population terrorisée
À Diafarabé, l’effroi s’est rapidement transformé en colère. Les mères et les épouses des victimes ont manifesté devant la mairie et exigé des réponses. L’armée, qui avait initialement promis le retour prochain des prisonniers, se retrouve sous le feu des critiques. Elle affirme avoir ouvert une enquête pour « allégations de disparitions », tout en dénonçant une tentative de manipulation. Pour les familles, ces déclarations sonnent comme un déni supplémentaire face à une tragédie bien réelle.
Un climat explosif dans une zone sous influence jihadiste
Le secteur de Diafarabé n’est pas étranger aux violences. Depuis des mois, il est la cible d’attaques du Jnim, un groupe jihadiste affilié à Al-Qaïda. Mais les victimes du 12 mai n’étaient pas armées. En mars dernier, une embuscade dans la même région avait coûté la vie à plusieurs soldats maliens, ce qui pourrait avoir attisé un désir de représailles. Aujourd’hui, le Jnim condamne les exécutions de Diafarabé et promet des ripostes. Un engrenage dangereux, dans une zone déjà instable.
Justice attendue, confiance brisée
À chaque massacre présumé, les autorités maliennes annoncent l’ouverture d’enquêtes. Mais les conclusions ne sont jamais publiées, et les familles restent dans le doute, la douleur et l’impuissance. À Diafarabé, la peur est désormais omniprésente. Plusieurs habitants ont fui le village et redoutent d’être les prochaines cibles. Alors que l’armée devait incarner la sécurité, elle est aujourd’hui perçue par certains comme une menace. La confiance est brisée, et la question demeure : qui protègera les civils quand leurs protecteurs deviennent bourreaux ?