Côte d’Ivoire : 13 membres du principal parti d’opposition arrêtés pour « complot contre l’État »


Lecture 4 min.
tidjane-thiam-696x392

Treize membres du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) ont été arrêtés et inculpés pour « complot contre l’État » et « troubles à l’ordre public ». Le PDCI dénonce une manœuvre d’intimidation du pouvoir, tandis que les autorités assurent qu’il s’agit d’une procédure judiciaire régulière.

La scène politique ivoirienne s’embrase de nouveau. Treize militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), formation dirigée par Tidjane Thiam, ont été arrêtés puis inculpés pour « complot contre l’autorité de l’État » et « troubles à l’ordre public ».
L’annonce a été faite par leur avocat, Me Sosthène Touré, qui dénonce des poursuites politiquement motivées dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions préélectorales.

Une marche interdite à l’origine des arrestations

Les interpellations font suite à la préparation d’une marche d’opposition prévue le 4 octobre à Abidjan. Cette manifestation, organisée conjointement par le PDCI et le PPA-CI de Laurent Gbagbo, devait se tenir sous le slogan « Pour la démocratie, la justice et la paix ».
Les autorités avaient cependant interdit la marche, invoquant des « risques élevés de trouble à l’ordre public ».

Malgré cette interdiction, les opposants avaient annoncé leur intention de reporter la mobilisation au 11 octobre, une initiative que le gouvernement a également jugée illégale.
Selon Me Touré, ses clients sont accusés d’avoir organisé la marche interdite et d’avoir préparé « des actions subversives ».

« L’un d’entre eux aurait même été arrêté par erreur », précise l’avocat. Tous ont été déférés devant la cellule d’enquête spécialisée dans la lutte antiterroriste.

Des inculpations au parfum politique

Pour le PDCI, ces arrestations relèvent clairement d’une stratégie d’intimidation.
« On veut embastiller nos militants pour faire taire toute contestation », s’indigne Jean-Chrysostome Blessy, député et avocat du parti. Les autorités, elles, affirment que les interpellations n’ont aucun lien avec l’appartenance politique des suspects, et qu’elles s’inscrivent dans le cadre « de procédures judiciaires régulières ».

Ces arrestations interviennent alors que la tension monte entre le pouvoir et l’opposition, après le rejet des candidatures de Tidjane Thiam et Laurent Gbagbo à la prochaine élection présidentielle. Le Conseil constitutionnel a justifié ces exclusions par la radiation des deux leaders de la liste électorale, l’un pour des questions de nationalité, l’autre en raison d’une condamnation pénale.

Un climat politique de plus en plus crispé

Cette affaire illustre le climat de méfiance et de polarisation qui règne en Côte d’Ivoire à l’approche du scrutin présidentiel. L’opposition accuse le président Alassane Ouattara, au pouvoir depuis 2011, de vouloir briguer un quatrième mandat, en violation de la Constitution qui limite le nombre de mandats à deux.

Le gouvernement soutient de son côté que l’adoption de la nouvelle Constitution de 2016 a remis les compteurs à zéro, rendant une nouvelle candidature légale. Dans ce contexte explosif, les arrestations de militants du PDCI apparaissent comme un nouvel épisode de la confrontation entre pouvoir et opposition, à la fois sur le terrain judiciaire et politique.

L’opposition fragilisée mais déterminée

Malgré ces coups durs, le PDCI et le PPA-CI continuent d’appeler à la mobilisation pacifique pour « la défense de la démocratie ». Quatre candidats issus de l’opposition — Jean-Louis Billon, Simone Ehivet Gbagbo, Ahoua Don Mello et Henriette Lagou — sont encore en lice pour affronter Alassane Ouattara.

Mais l’absence de Tidjane Thiam et de Laurent Gbagbo, figures majeures de la vie politique ivoirienne, affaiblit considérablement le poids de l’opposition à quelques mois du scrutin.
Pour l’heure, ni la présidence ni le ministère de la Justice n’ont fait de déclaration officielle sur ces arrestations, laissant planer le doute sur les véritables motivations du pouvoir.

Avatar photo
LIRE LA BIO
Fidèle K est journaliste et rédactrice spécialisée, passionné par l'Afrique et ses dynamiques politiques, culturelles et sociales. A travers ses articles pour Afrik, elle met en lumière les enjeux et les réalités du continent avec précision et engagement.
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News