
Le retour au pays de Maurice Kamto, figure de proue de l’opposition camerounaise et candidat déclaré à la présidentielle de 2025, a donné lieu à un bras de fer silencieux entre le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) et les autorités locales. Après un week-end marqué par un impressionnant dispositif sécuritaire et une mobilisation de ses partisans, l’opposant a finalement quitté Douala ce lundi, sans avoir pu rencontrer ses sympathisants.
Arrivé samedi soir dans la capitale économique camerounaise après une tournée européenne conclue par un meeting remarqué à Paris le 31 mai, Maurice Kamto comptait tenir une réunion le lendemain au siège du MRC à Deido Grand Moulin. Objectif : galvaniser ses bases locales à six mois d’une élection présidentielle très attendue. Mais dès dimanche matin, la police a verrouillé les accès aux lieux, évoquant une absence de déclaration préalable de la manifestation.
Tensions et blocages
L’appel de Maurice Kamto à ses partisans n’est toutefois pas resté lettre morte. Des centaines de militants ont convergé vers le siège du parti, donnant lieu à un face-à-face tendu avec les forces de l’ordre. Ce dimanche 8 juin, la tension est allée crescendo dans les rues de Douala, particulièrement à Deido, quadrillé par les forces du Groupement mobile d’intervention (GMI), du Groupement spécial d’opérations (GSO) et de la gendarmerie.
Lundi matin, le leader du MRC a tenté une nouvelle fois de relancer la rencontre, conformément à son annonce du dimanche soir sur ses réseaux sociaux dans laquelle il donnait rendez-vous à ses militants à 10h au siège du parti. Mais une fois de plus, l’imposant dispositif de sécurité a eu raison de la mobilisation. La zone entourant le QG du MRC, tout comme la résidence dans laquelle se trouvait Maurice Kamto à Bonapriso, dans le 1er arrondissement, était placée sous haute surveillance.
Départ sous escorte vers Yaoundé
Resté cloîtré dans la résidence tout le week-end, Maurice Kamto a quitté Douala, ce lundi, peu avant 13h, sous escorte de la police et de la gendarmerie D’après ses collaborateurs, destination Yaoundé, sa ville de résidence habituelle. Selon les responsables locaux du MRC, une douzaine de militants auraient été interpellés durant ces deux jours de tensions. L’administration, quant à elle, observe pour l’instant un silence assourdissant : aucune déclaration n’a été faite à propos des mesures de sécurité mises en place ni des motivations précises ayant conduit à interdire les activités du MRC.
Ce nouvel épisode vient souligner la crispation croissante du climat politique à l’approche du scrutin présidentiel prévu pour octobre 2025. Le retour triomphal de Maurice Kamto après son meeting parisien – où il a rassemblé des milliers de Camerounais de la diaspora – semble avoir inquiété les autorités, qui redoutent de voir le leader de l’opposition réactiver les dynamiques contestataires de 2018.
Pour rappel, Maurice Kamto avait été arrêté et emprisonné début 2019, après avoir contesté les résultats de la présidentielle de 2018 remportée par Paul Biya, au pouvoir depuis plus de 40 ans. Libéré après près de neuf mois de détention, il reste depuis sous haute surveillance, et ses moindres déplacements sur le territoire sont l’objet d’un encadrement strict.
Quelle suite pour le MRC ?
Alors que l’élection présidentielle se profile, l’empêchement répété des activités publiques du MRC soulève des inquiétudes sur les conditions d’une compétition électorale équitable. Les cadres du parti, encore mobilisés à Douala, affirment que la stratégie de Maurice Kamto reste inchangée : continuer à rassembler et à faire campagne pacifiquement, malgré les entraves.
Mais pour de nombreux observateurs, cet épisode à Douala témoigne d’une volonté manifeste des autorités de neutraliser l’élan populaire que semble retrouver le MRC dans une atmosphère politique où le silence des institutions contraste avec l’effervescence de la société civile.