Armes chinoises au Soudan : Amnesty met Pékin sur la sellette


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Soldats de l'armée soudanaise
Soldats de l'armée soudanaise

Au Soudan, un rapport accablant d’Amnesty International révèle que des armes chinoises, livrées via les Émirats arabes unis, se retrouvent entre les mains des Forces de soutien rapide. Une révélation qui met Pékin sur la sellette et attise les tensions régionales.

Alors que la guerre fait toujours rage au Soudan entre l’armée régulière et les Forces de soutien rapide (FSR), un nouveau rapport d’Amnesty International jette une lumière crue sur les circuits opaques de la fourniture d’armes. Selon l’ONG, des équipements militaires de fabrication chinoise, livrés via les Émirats arabes unis, sont entre les mains des paramilitaires soudanais. Une révélation qui met en cause indirectement la Chine, tout en ravivant les tensions diplomatiques régionales.

Des bombes chinoises sur Khartoum et le Darfour

Amnesty International affirme avoir identifié des « bombes guidées chinoises GB50A et des obus AH-4 de 155 mm » parmi les débris d’attaques menées par les FSR au Darfour et à Khartoum. Ces munitions, issues de l’industrie d’armement Norinco — un conglomérat de défense chinois détenu par l’État — seraient arrivées dans le pays via les Émirats arabes unis. Cette chaîne d’approvisionnement, si elle se confirme, constitue une violation flagrante de l’embargo sur les armes imposé par l’ONU au Soudan.

Les Émirats, pointés du doigt par Amnesty comme le relais logistique entre la Chine et les groupes paramilitaires soudanais, nient catégoriquement toute implication. Le ministère émirien des Affaires étrangères a qualifié les accusations de l’ONG de « sans fondement et dénuées de preuves ». Pourtant, selon les données du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), Abou Dhabi a bien été le seul importateur connu des obus AH-4 chinois en 2019, renforçant ainsi les soupçons d’un appui indirect aux FSR.

Réactions diplomatiques et chaos humanitaire

La publication du rapport intervient dans un climat de violence exacerbée, marqué par une série d’attaques de drones sur des installations stratégiques à Port-Soudan et dans d’autres régions. Ces frappes, attribuées aux FSR, ont poussé des milliers de civils à fuir ce qui était jusque-là perçu comme une zone relativement sûre. Face à l’escalade, le gouvernement soudanais a rompu ses relations diplomatiques avec les Émirats, les accusant ouvertement d’armer leurs ennemis. De son côté, la Chine, dont le nom apparaît désormais dans la chaîne de responsabilité, a appelé ses ressortissants à quitter « immédiatement » le pays.

Depuis avril 2023, le conflit oppose deux anciens alliés : le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée, et son ex-bras droit, le général Mohamed Hamdane Daglo, leader des FSR. Cette guerre interne, qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts et entraîné plus de 13 millions de déplacements forcés, semble alimentée de l’extérieur. Le rapport d’Amnesty jette ainsi une lumière crue sur l’implication de puissances étrangères dans la prolongation du conflit, posant la question de leur responsabilité morale et juridique.

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