Angola : la grève historique des journalistes stoppée par la justice


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Liberté de la presse
Liberté de la presse

En Angola, la première grève de journalistes publics depuis l’indépendance de 1975 a été stoppée net par la justice. Le tribunal provincial de Luanda a jugé que ce mouvement, prévu pour débuter le 8 septembre, violerait le droit des citoyens à s’informer. Les syndicats dénoncent une décision politique qui étouffe leurs revendications salariales et révèle la précarité persistante des professionnels des médias. Pour beaucoup, cette suspension symbolise la fragilité de la liberté de la presse dans le pays.

Un mouvement inédit des journalistes de la presse publique angolaise vient d’être suspendu par décision de justice. Prévue pour débuter ce lundi, cette grève aurait constitué la première mobilisation de ce type depuis l’indépendance du pays en 1975. Mais le tribunal provincial de Luanda a jugé qu’elle « violerait le droit fondamental des citoyens à s’informer », provoquant la colère et la déception des syndicats.

Une mobilisation inédite avortée

Le Syndicat des Journalistes Angolais (SJA) avait annoncé une grève générale visant à dénoncer la précarité persistante des professionnels des médias publics. C’était une première depuis près de cinquante ans d’indépendance, signe de la gravité du malaise dans la profession. Mais saisi par les directions des chaînes d’État, le tribunal a ordonné la suspension du mouvement, contraignant les journalistes à se conformer à la décision pour éviter toute accusation de « désobéissance publique ».

Pour le SJA, la grève était avant tout motivée par des revendications salariales et professionnelles. Le syndicat réclame une augmentation de 100 % des salaires. Ils estiment que les rémunérations actuelles ne permettent ni de vivre dignement ni d’exercer le métier avec indépendance.

« Nos faibles revenus nous placent dans une situation de dépendance vis-à-vis du gouvernement », déplore André Mussamo, porte-parole du syndicat. Il souligne que nombre de journalistes n’ont pas les moyens de financer leurs déplacements ou d’organiser des reportages en province sans l’appui direct des ministères, une dépendance qui mine l’éthique et l’autonomie éditoriale.

Le combat loin d’être terminé

Si la grève est suspendue, le SJA assure que le combat continue. Ses avocats examinent les arguments du tribunal afin de trouver une voie légale pour maintenir la mobilisation. Pour beaucoup de journalistes, cette suspension illustre la fragilité de la liberté de la presse en Angola. « C’est la première fois que nous déposons un cahier de revendications, et nous irons jusqu’au bout », a insisté Mussamo.

Cette crise met en lumière les tensions persistantes entre les autorités et le secteur médiatique en Angola. Entre exigences de survie économique et aspiration à l’indépendance éditoriale, les journalistes veulent transformer ce mouvement avorté en un tournant historique pour leur profession. Reste à savoir si la justice angolaise acceptera, à terme, de reconnaître leur droit à revendiquer de meilleures conditions de travail.

Maceo Ouitona
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Maceo Ouitona est journaliste et chargé de communication, passionné des enjeux politiques, économiques et culturels en Afrique. Il propose sur Afrik des analyses pointues et des articles approfondis mêlant rigueur journalistique et expertise digitale
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