Accra ferme la porte aux mines dans les réserves forestières : un souffle d’espoir pour la nature


Lecture 4 min.
Forêt

Le gouvernement ghanéen a officiellement annulé cette semaine une loi controversée adoptée en 2022, qui permettait au Président d’autoriser des licences minières dans les réserves forestières du pays.

La décision de l’exécutif ghanéen constitue un grand pas dans la protection de l’environnement, dans un pays où l’orpaillage illégal et l’exploitation minière industrielle ont profondément dégradé les écosystèmes.

Une promesse de campagne tenue par le Président Mahama

Le ministre ghanéen de l’Environnement, des Sciences et des Technologies a annoncé l’abrogation du texte, confirmant ainsi l’engagement du Président John Dramani Mahama, revenu au pouvoir dans un contexte d’urgence écologique. Le Ghana, premier producteur d’or du continent africain, compte près de 288 réserves forestières, longtemps considérées comme des sanctuaires naturels. Mais la loi de 2022 avait ouvert une brèche majeure en autorisant l’exécutif à y délivrer des permis miniers.

Dans un pays profondément marqué par l’orpaillage illégal, appelé localement galamsey, et ses effets dévastateurs sur les terres et les cours d’eau, la suppression de cette loi était attendue de longue date.

Une « étape très positive », saluent les ONG

Pour les défenseurs de l’environnement, la décision représente une victoire, mais aussi un retour à une logique de conservation. Daryl Bosu, vice-président de l’ONG A Rocha Ghana, se réjouit d’un changement d’orientation majeur : « C’est une étape très positive. Cela démontre que le gouvernement est disposé à restaurer ce qui a été perdu. Nous sommes de retour sur la voie d’une exclusion totale de l’exploitation minière dans nos réserves forestières ».

Selon une étude menée par A Rocha Ghana, plus de 90 % des réserves forestières étaient menacées par des projets miniers potentiels depuis l’adoption du texte de 2022. L’annulation de cette disposition constitue donc un frein essentiel à la déforestation, à l’érosion des sols et à la contamination des eaux.

Des forêts encore loin d’être sauvées

Malgré cette avancée, les organisations de protection de la nature restent prudentes. Pour elles, l’abrogation du texte ne suffit pas à stopper l’ensemble des menaces qui pèsent sur les forêts ghanéennes.

Daryl Bosu souligne que l’exploitation illégale continue d’annihiler les efforts de conservation : « Il va également falloir s’occuper des mines artisanales, mais aussi de l’exploitation illégale du bois et de l’accaparement agricole des terres. Ce sont autant de facteurs qui endommagent nos forêts en leur sein, finissant par les détruire ».

Les chiffres officiels confirment cette inquiétude : une quarantaine de réserves forestières seraient encore affectées par l’orpaillage illégal, malgré les opérations régulières des forces de sécurité et les campagnes de sensibilisation.

Orpaillage illégal : un fléau socio-environnemental

L’extraction artisanale de l’or, souvent réalisée sans autorisation, est aujourd’hui l’un des principaux moteurs de la pollution des cours d’eau, notamment dans les régions d’Ashanti, de l’Est et du Centre. Les rivières Pra, Offin et Birim en sont des exemples tragiques : autrefois sources d’eau potable, elles sont aujourd’hui chargées de boues, de mercure et de cyanure. Le phénomène prend racine dans la pauvreté rurale et l’absence d’alternatives économiques durables, rendant d’autant plus complexe la lutte contre ces pratiques destructrices.

La décision du gouvernement de restaurer l’intégrité des réserves forestières est saluée par les experts comme un signal fort. Mais puisque la bataille est loin d’être terminée, les ONG appellent désormais à un renforcement des inspections environnementales, à la régulation des activités minières artisanales et à un plan national de restauration des forêts dégradées.

Pour le Président Mahama, cette décision marque l’un des premiers jalons d’une politique environnementale ambitieuse. Reste à savoir si cette dynamique sera suffisante pour freiner l’emprise du galamsey et protéger durablement les derniers bastions forestiers du Ghana.

Avatar photo
Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
Facebook Linkedin
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News