« Papa Eyadéma » est mort


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Le Président togolais Etienne Eyadéma Gnassingbé, qui présidait depuis 38 ans aux destinées de son pays, est mort samedi 5 février 2005 des suites d’une crise cardiaque. Avec cette disparition soudaine, le rideau tombe sur toute une époque de l’histoire du Togo. L’Union africaine dénonce déjà le risque d’un coup d’Etat militaire.

Il y a quelques semaines à peine, le Togo célébrait comme à l’accoutumée le trente-huitième anniversaire de l’arrivée au pouvoir d’Etienne Eyadéma Gnassingbé, par de multiples défilés populaires, et réjouissances civiles et militaires à Lomé… Et voici que les objets frappés à l’effigie de « Papa Eyadéma », offerts ou vendus pour l’occasion, assiettes, tee-shirts, cotillons réalisés pour ce 38ème anniversaire… deviennent déjà des objets de collection : celui qui était aujourd’hui le plus ancien dirigeant africain, à la tête du Togo depuis janvier 1967, est mort subitement.

Une disparition brutale

Agé seulement de 69 ans, apparu hier en grande forme lors des audiences qu’il accorda à des visiteurs, Etienne Eyadéma Gnassingbé aurait été victime d’une crise cardiaque dans la matinée du samedi 5 février 2005, dans sa ville natale de Pya, située dans le Nord du Togo. Aussitôt transporté en urgence par avion vers l’Europe, il est mort avant même d’être arrivé à destination. Son décès a été officiellement annoncé par un communiqué du gouvernement togolais, le proche conseiller du général-président Barry Moussa Barkué insistant peu après sur la « soudaineté » de ce décès. Il survient en effet comme un coup de tonnerre dans un ciel serein, à un moment où la Commission européenne venait il y a quelques mois de normaliser ses relations avec le Togo et où la situation politique s’orientait, cahin-caha, vers une démocratisation du régime.

Le pouvoir togolais pris de court

La soudaineté du décès semble avoir pris de court l’ensemble de l’appareil d’Etat togolais, dont la constitution prévoit « qu’en cas de vacance de la présidence de la république par décès, la fonction présidentielle est exercée provisoirement par le président de l’assemblée nationale… » Avant qu’une élection présidentielle soit organisée « dans les soixante jours de l’ouverture de la vacance ». Or deux heures après l’annonce du décès d’Eyadéma, le général Zakari Nandja, chef d’Etat-major de l’armée togolaise, annonçait la nomination à la présidence du fils du président défunt, Faure Gnassingbé, en lieu et place du président de l’Assemblée nationale, Fambaré Natchaba Ouattara, présenté comme « absent du territoire national ».

Le risque d’un coup d’Etat militaire

Après s’être dit lui-même « très en peine » suite au décès brutal du Président Eyadéma, le Président de la Commission de l’Union africaine, Alpha Oumar Konaré, a immédiatement déclaré que l’Union « n’acceptera jamais de mesures anticonstitutionnelles pour sa succession », soulignant le risque d’un « coup d’Etat militaire » derrière la désignation de Faure Gnassingbé, auquel l’armée a fait officiellement allégeance.

Un rappel utile, qui peut être entendu également en filigrane de la déclaration du Président français Jacques Chirac, qui a exprimé sa « profonde tristesse » après le décès d’un « ami de la France, ami personnel », en espérant que le peuple togolais « se trouvera démocratiquement rassemblé dans cette épreuve qui intervient au moment même où des perspectives nouvelles se faisaient jour pour le Togo ».

La mort d’Eyadéma pourrait être l’occasion d’engager véritablement un renouveau démocratique du Togo : il ne faudrait pas à l’inverse qu’elle sonne le glas des espoirs qui renaissaient depuis quelques mois. C’est ce à quoi l’Union africaine comme les autres pays francophones semblent d’emblée très attentifs…

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