Alpha Oumar Konaré prend ses fonctions


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Drapeau du Mali
Drapeau du Mali

Un an après avoir quitté la présidence de la République malienne, Alpha Oumar Konaré a pris mardi ses fonctions à une autre présidence, celle de la Commission de l’Union africaine. L’ancien chef d’Etat a su profiter, le 10 juillet dernier, de son image d’intellectuel démocrate panafricaniste pour s’imposer sans difficulté à la tête de l’institution.

Alpha Oumar Konaré a été élu le 10 juillet dernier à la tête de la Commission de l’Union africaine (UA). Sans opposant. Rien de grave, la pratique est commune dans ce type de scrutin où il est plus question de cooptation que d’élection. Pour ce qui est de l’image démocratique de l’institution Alpha Oumar Konaré semble être l’homme de la situation. Après avoir accédé en 1992 à la présidence de la République malienne à la suite d’élections libres, il a accepté l’alternance en 2002 en abstenant de se représenter à l’issue de son deuxième mandat. Certes, la Constitution le lui interdisait. Mais le seul fait de ne pas l’avoir modifiée ou transgressée a fini d’imposer son image de démocrate ! Madeleine Albright, l’ex-secrétaire d’Etat de la plus vieille démocratie, les Etats-Unis, ne dit-elle pas de lui que « c’est un démocrate sincère ».

Panafricaniste de la première heure

Démocrate, donc, mais aussi panafricaniste convaincu. « Mon panafricanisme ne date pas d’aujourd’hui, je suis prêt à me battre pour mon continent », aurait déclaré le candidat Konaré à son successeur à la tête de l’Etat malien, Amadou Toumani Touré, qui lui proposait de se présenter à la présidence de la Commission de l’UA. Alpha Oumar Konaré a assumé de 1999 à 2000 les fonctions de président en exercice de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). A ce poste, « pour faire avancer la cause de l’Union africaine, [il] a pris un avion-taxi pour visiter en moins d’une semaine les [quinze] pays de la Cedeao », se souvient un actuel ministre.

Sa vision de l’Afrique, Alpha Oumar Konaré la doit à Modibo Keïta, le père de l’indépendance malienne, a qui il a érigé un mémorial à Bamako. « J’étais étudiant, puis professeur stagiaire à Bamako, et la vision qu’avait le président Modibo de l’Afrique nous inspirait profondément », raconte-t-il. Selon l’un de ses compagnons politiques, l’une de ses satisfactions est d’avoir maintenu dans la Constitution malienne que « pour réaliser l’Union africaine, le Mali est prêt à perdre une partie ou toute sa souveraineté ». Un principe qu’il aimait à rappeler.

Rhétorique et réalité

Ces qualités de démocrate et de panafricaniste, les Maliens ne les lui contestent pas. Mais il leur est parfois difficile de voir encensé l’homme qui les a dirigés dix années, sans que l’on considère son bilan. Un bilan peu reluisant. Alpha Oumar Konaré a accédé à la présidence en 1992 à la place du Général-Président Moussa Traoré, l’homme qui, 21 ans plus tôt, avait renversé le Président Modibo Keïta. Cela, dans un contexte social explosif. Le nouveau Président promet travail et éducation aux Maliens, fin de la corruption… 10 ans plus tard, le compte n’y est pas. Plus de 70% de la population malienne vit avec moins de 650 FCFA par jour. Et un rapport de mission de la Banque mondiale qu’Alpha Oumar Konaré a lui-même sollicité évoque un « pays pauvre, où la démocratie n’a jamais vraiment pris racine… ».

Dans ces conditions, la construction de la résidence de Titibougou, dont la fonction officielle n’a été connue que lorsque Alpha Oumar Konaré s’y est installé en tant que premier ancien Président malien, n’était peut-être pas des plus indiquée. De la même façon, en guise d’adieux, en 2002, l’ex-chef d’Etat a offert à son pays la Coupe d’Afrique des Nations. Un magnifique cadeau que les Maliens continuent de payer.

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