La nouvelle croisade de l’Indiana Jones égyptien


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Le Chef du Conseil suprême des antiquités égyptiennes (CSA) Zahi Hawass a réclamé ce mercredi à Londres le retour en Égypte de la pierre de Rosette, célèbre stèle historique exposée au British Museum depuis plus de 200 ans. Cette demande est la dernière en date d’une série de requêtes plus ou moins cordiales adressées par le célèbre égyptologue aux plus prestigieux musées du monde, dans sa croisade pour la restitution à son pays de diverses antiquités, qui lui ont été arrachées durant la période coloniale.

L’Indiana Jones du Nil, comme on le surnomme en raison de son chapeau d’aventurier, possède en plus du couvre-chef, le panache du personnage. Interviewé sur les ondes de la BBC mercredi, le Chef du Conseil suprême des antiquités égyptiennes (CSA), Zahi Hawass, a ouvertement défié les autorités du prestigieux British Museum de Londres, en réclamant la restitution de l’une de leurs pièces maîtresses : la pierre de Rosette. Présente en Grande-Bretagne depuis plus de 200 ans, la fameuse pierre, qui a permis à Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes, « devrait [désormais] revenir à l’Égypte », à qui « elle appartient », a déclaré Zahi Hawass. Volontairement provocateur, il a jugé « inexact » de dire que la pierre de Rosette était [propriété] « de la culture mondiale », puisqu’elle est « l’icône de l’identité égyptienne ».

Alors que jusqu’à présent l’Égypte ne demandait qu’un prêt de la pierre, il semble qu’elle ait choisi de hausser le ton à l’égard de son ancien colonisateur britannique, qui manifesterait, selon Zahi Hawass, beaucoup de méfiance à l’idée de voir la pierre revenir sur ses terres. « Certaines personnes dans la presse [britannique] ont commencé à dire que si le British Museum prête la pierre de Rosette à l’Égypte, peut-être que les Égyptiens ne la rendront pas. […] Nous ne sommes pas des pirates des Caraïbes », s’est-il indigné. Prêt ou restitution définitive, il semblerait que les autorités britanniques aient d’ores et déjà tranché la question. Le directeur du Conseil des Musées, Bibliothèques et Archives britanniques Roy Clare a eut tôt fait de réaffirmer ce mercredi que la pierre resterait à Londres. Loin d’être close, la discussion vient ainsi relancer le débat envenimé du retour des biens culturels volés dans leurs pays d’origine.

5000 pièces volées à l’ Égypte récupérées à l’étranger

A la pointe de ce combat culturel, Zahi Hawass a fait trembler jusqu’ici plus d’un responsable de musée dans le monde, et souvent pas des moindres. Dernières en date, les autorités du Louvre ont dû se plier à ses exigences après qu’il les a menacées d’interdiction d’accès à des sites archéologiques égyptiens si elles refusaient de lui rendre cinq fragments de peinture murale vieux de plus de 3000 ans. Les cinq fresques pharaoniques en question, qui avaient été achetées dans des salles de vente parisiennes, avaient été volées dans une tombe de Louxor, en Égypte, ce qu’ignoraient apparemment les autorités françaises. Pour l’ « Indy » égyptien, la bataille est tout simplement salutaire car elle répond à une question de principe, et il n’hésite pas à mettre en garde ceux qui y dérogent. « Un directeur de musée qui refuse de restituer un objet volé, comme celui de Saint Louis (États-Unis), avec le masque funéraire de Ka-Nefer-Nefer, volé à Saqqarah en 1966, mérite d’être destitué de son poste », a-t-il estimé dans un article paru ce jeudi dans le Figaro.

La Pierre de Rosette des Britanniques, le buste de Nefertiti des Allemands et le zodiaque de Dendérah des Français ne sont que la partie immergée de l’iceberg que forment les trésors historiques égyptiens encore éparpillés dans le monde. Jusqu’à présent, la présence de Zahi Hawass à la tête du CSA, ses réseaux et sa forte médiatisation, notamment aux Etats-Unis où il est considéré comme une star, ont facilité le retour de 5000 antiquités en Égypte. Voulant faire de son combat celui de tous les pays spoliés, l’égyptologue a en outre fait savoir dimanche dernier qu’il accueillerait bientôt une conférence des pays désireux de voir les musées du monde leur rendre leurs œuvres d’art, selon Lakoom Info. Grecs, Italiens, Chinois, Mexicains et Ghanéens, seraient sans doute aux premiers rangs des invités. En dépit de ses exploits historico-médiatiques, l’Indiana d’ Égypte a appris à ses dépens qu’il avançait en terrain diplomatiques glissant. En 2003, ses menaces de fermeture de la mission du Français Jean-Yves Empereur à Alexandrie avaient nécessité l’intervention directe du président français Jacques Chirac auprès de son homologue Hosni Moubarak. Les autorités du British Museum resteront-elles de pierre face à son offensive?

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