Kadhafi menace de tourner le dos à l’Afrique


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Le Guide libyen Mouammar Kadhafi a menacé, mardi, lors d’une conférence de presse à Tripoli, de « tourner le dos » à l’Afrique et de diriger ses investissements vers d’autres régions du monde, si le continent ne s’unit pas rapidement. Il a déclaré mettre beaucoup d’espoirs dans le 10e sommet de l’Union africaine (UA), qui débute jeudi, pour atteindre cet objectif.

« Si l’unité ne se réalise pas, la Libye va tourner le dos à l’Afrique et se tournera vers une autre alternative, arabo-méditerranéenne ou euro-méditerranéenne ! », a asséné le Guide libyen, Mouammar Kadhafi, mardi, lors d’une conférence de presse à Tripoli. A la veille de son départ pour Addis Abeba, en Ethiopie, où il doit participer de jeudi à samedi au 10e sommet de l’Union africaine, il a menacé de réorienter les investissements libyens en Afrique, estimés selon lui à plus de 5 milliards de dollars par an, vers des pays arabes ou méditerranéens.

Pour le colonel Khadafi, « le sommet d’Addis Abeba doit être décisif pour la création de l’unité africaine. » Un projet qu’il défend depuis de nombreuses années. Lors du dernier sommet de l’UA, en juillet 2007, au Ghana, il avait même proposé la création d’un gouvernement fédéral africain, mais les 53 pays membres de l’UA avaient exprimé leurs divergences sur ce projet. Le caractère, pour l’heure, peu réaliste de l’entreprise et l’appétit de pouvoir du dirigeant libyen mettant les autres chefs d’Etat africains sur leurs gardes.

« Je dis à ceux qui se demandent pourquoi la Libye est enthousiaste pour l’unité africaine ? ou pourquoi Kadhafi veut avec cette détermination réaliser l’unité africaine ?, que cela est en faveur de l’Afrique et non pas uniquement en faveur de la Libye. La Libye réalisera sa souveraineté et son intérêt par l’unité de l’Afrique, par l’existence d’une souveraineté africaine protégée, par une défense africaine unique, par une force économique africaine unique et un seul marché africain », a répondu le colonel Kadhafi à ses détracteurs, mardi, à Tripoli. « La Libye ne participera pas à la vente de l’Afrique et à la trahison du continent et elle va mettre à nu celui qui le trahira », a-t-il ajouté.

Kadhafi veut prendre le contrôle de l’Union africaine

Durant le mois de janvier, le colonel Kadhafi a reçu en moins d’une semaine une dizaine de chefs d’Etats africains sous sa tente à Tripoli pour tenter de les rallier à sa croisade unitaire, en perspective du sommet d’Addis Abeba. Son plan pour parvenir à ses fins : menacer de supprimer la manne financière libyenne pour placer l’un de ses proches à la tête de l’Union africaine. Ainsi, hier, il a annoncé la candidature de son vice-ministre aux affaires africaines, Ali Triki, au poste de président de la Commission, qui devrait être désigné lors du sommet d’Addis Abeba en remplacement d’Alpha Oumar Konaré. Suggérant que certains Etats africains avaient des « positions racistes vis-à-vis des Arabes », il a précisé qu’il trouvait inadmissible que ces derniers soient systématiquement écartés de la direction de l’Union : « les Arabes sont privés de ce poste depuis une quarantaine d’années malgré le fait qu’ils (…) contribuent à hauteur de 60% au budget de l’UA ».

Mouammar Kadhafi a affirmé qu’au cas où les autres pays africains refuseraient de la suivre dans son ambition unitaire, la Libye avait des alternatives et des options stratégiques prêtes. Selon lui, la Libye, plutôt que de s’investir dans le développement de l’Afrique, pourrait jouer un rôle décisif dans la réalisation de trois autres espaces, à savoir, l’espace méditerranéen, l’espace arabe et l’espace islamique.

« Nous n’avons pas de complexe ni peur de l’intégration avec l’Europe ou avec la Méditerranée parce que, nous, les révolutionnaires en Libye, avec notre culture, notre religion et notre grand patrimoine historique, qui avons changé plusieurs fois la carte du monde, sommes débarrassés du complexe d’infériorité, d’oppression et de complot selon lesquels l’Europe et la Méditerranée font peur et peuvent nous vaincre et nous coloniser » a-t-il déclaré au cours de sa dernière conférence de presse. « Si l’Afrique veut négliger son avenir, nous avons des alternatives stratégiques prêtes. Cependant, les pays africains vont périr, parce qu’ils ne disposent pas de ces potentialités pour sortir de la tombe dans laquelle on veut les enterrer », a-t-il ajouté. Les menaces de sécession de Mouammar Kadhafi sont elles à prendre au sérieux ou, simples moyens de pression pour obtenir la présidence de l’UA, relèvent-t-elle du bluff intégral ? Le prochain sommet de l’Union africaine et ses suites nous révéleront, sans doute, quelles sont les véritables intentions du Guide libyen.

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Journaliste, écrivain, dramaturge scénariste et réalisateur guadeloupéen. Franck SALIN fut plusieurs années le rédacteur en chef d'Afrik.com
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