Zimbabwe : l’opposition s’annonce victorieuse


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Alors que les résultats définitifs des élections générales, au Zimbabwe, ne sont toujours pas publiés, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) se déclare gagnant et annonce des chiffres bien au-delà des premiers décomptes qui le donnent à égalité avec le parti au pouvoir. L’opposition s’inquiète cependant du délai de publication des résultats, et soupçonne le régime de trucage des élections.

Les premiers résultats des élections générales, au Zimbabwe, donnent la ZANU-PF (Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique, au pouvoir) et le MDC (Mouvement pour le changement démocratique, opposition) au coude à coude. Sur les 24 sièges de députés déjà attribués lundi matin (sur 210 au total), les deux partis en remportaient douze chacun. Ce premier décompte établit la défaite – symbolique pour l’opposition – du ministre de la Justice Patrick Chinamasa, dans la circonscription rurale de Makoni Central (est). Mais alors que les résultats définitifs se font toujours attendre, le MDC revendique déjà la victoire. Selon ses propres pointages sur 128 des 210 circonscriptions du pays, son candidat Morgan Tsvangirai aurait remporté 60% des suffrages, contre 30% pour le président sortant Robert Mugabe.

Déjà dimanche, le secrétaire général du MDC, Tendai Biti, annonçait : « Mugabe a perdu l’élection. Chacun sait que personne n’a voté pour Mugabe, mais ils essaient maintenant de mitonner un résultat qui lui sera favorable. » Car l’opposition, qui a dénoncé la présence de milliers d’électeurs fantômes sur les listes électorales, soupçonne le régime d’un nouveau trucage, et le délai entre le vote, samedi, et les premiers résultats officiels, lundi, sont pour elle la preuve d’une manipulation des votes. Le porte-parole du MDC, Nelson Chamisa, a estimé lundi que « ces retards sont une expression de la panique de la ZANU-PF ». « Le peuple a parlé. Le MDC a gagné et nous espérons que la volonté du peuple sera respectée. Trafiquer les résultats ne changera rien. »

Intimidations du gouvernement

Ces déclarations ne sont pas du goût du régime, qui a averti l’opposition que toute revendication précoce équivalait à une tentative de coup d’Etat. « Et nous savons tous comment on répond aux coups d’Etat », a prévenu le porte-parole du gouvernement, George Charamba, dans les colonnes du Sunday Mail. De fait, des unités de la police anti-émeute se sont déployées dans les rues de la capitale, Harare, dans la nuit de dimanche à lundi. Le quotidien Herald, proche du pouvoir, accuse l’opposition d’avoir « préparé ses partisans à la violence en préemptant les résultats et en revendiquant la victoire ».

Les forces de l’ordre sont allées jusqu’à annoncer qu’elles s’opposeraient à tout changement de régime, ce qui n’a pas plu à la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), observatrice du scrutin. Mais c’est bien le seul reproche qu’elle ait fait à propos du déroulement des élections, qu’elle a jugées, dimanche, « pacifiques et crédibles ». Deux représentants de l’Alliance démocratique (DA), parti sud-africain d’opposition, ont cependant refusé de signer le rapport préliminaire. « Il est à noter que les mots « libre et équitable », qui sont le seul barème permettant de juger une élection, ne sont pas employés », a souligné la députée DA Diane Kohler Barnard.

La commission électorale au pied du mur

Par ailleurs, une coalition de 38 organisations non gouvernementales zimbabwéennes, le Zimbabwe Election Support Network (ZESN), a remarqué que « le délai dans l’annonce des résultats alimente les spéculations selon lesquelles quelque chose se trame ». Le président de la commission électorale, George Chiweshe, avait d’ailleurs avoué dimanche n’avoir « aucune idée » du moment où les résultats de la présidentielle seraient publiés. Il a ensuite expliqué ce retard, lundi, par « la nécessité de vérifier les résultats avec méticulosité », estimant que « deux jours, c’est assurément un délai raisonnable pour des élections de cette ampleur ». A sa décharge, on peut concéder qu’au cours de ce scrutin se jouaient les élections présidentielle, législatives, sénatoriales et locales. Lundi, la Commission européenne a jugé « opportun que la commission électorale zimbabwéenne publie les résultats définitifs aussi vite que possible pour prouver son indépendance ».

Outre Morgan Tsvangirai, Robert Mugabe, 84 ans dont vingt-huit à la tête du Zimbabwe, affrontait Langton Toungana, nouveau venu en politique, et Simba Makoni, son ancien ministre des Finances entré en dissidence : il aurait obtenu 10% des voix selon le MDC.

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